L’UNF demande au Canada de soutenir l’étude de l’agroécologie pour la sécurité alimentaire et la nutrition
Vous trouverez ci-dessous le texte de la lettre envoyée le 26 avril 2017.
Monsieur le Ministre MacAulay et les membres de la Mission permanente du Canada auprès des agences de la FAO :
Nous vous écrivons au nom de du Canada au sujet d’une question très importante qui fait actuellement l’objet de discussions au sein du Comité des Nations unies sur la sécurité alimentaire mondiale (CSA) : la proposition du CSA de demander au Groupe d’experts de haut niveau de préparer un rapport sur « l’agroécologie pour la sécurité alimentaire et la nutrition » en 2019.
Cette proposition a été faite par des organisations de la société civile en novembre 2016. Par la suite, en novembre et décembre 2016, le CSA a entrepris un exercice de classement de toutes les propositions parmi les membres et les participants du CSA. Parmi tous les thèmes proposés pour un rapport du groupe d’experts de haut niveau (HLPE), l’agroécologie est arrivée en tête du classement, ayant reçu le plus de soutien.
Lors de la réunion du Groupe de travail à composition non limitée (GTCNL) du Programme de travail pluriannuel du CSA, qui s’est tenue le 6 février 2017, la proposition a été fortement soutenue par de nombreux États membres du CSA et d’autres participants au CSA, y compris les trois agences basées à Rome (FAO, FIDA et PAM), réaffirmant ainsi le résultat de l’exercice de classement.
Toutefois, à cette même occasion, certains pays, ainsi que le secteur privé, ont exprimé leurs doutes quant à cette proposition. Un pays a même déclaré qu’il s’agissait d’une « ligne rouge » pour lui et qu’il s’opposerait donc à la sélection de l’agroécologie. Ils ont suggéré que le groupe de travail définisse un thème différent et plus large.
À la fin du mois de mars, le président du groupe de travail sur le plan de travail pluriannuel a proposé deux options qui seront examinées lors du CSA le 2 mai 2017. La première option présentée par la présidence est la proposition originale intitulée « Agroécologie pour la sécurité alimentaire et la nutrition », qui était arrivée en tête du classement. La deuxième option serait un thème plus général intitulé « Approches novatrices des systèmes alimentaires et agricoles pour améliorer la sécurité alimentaire et la nutrition ».
Compte tenu de cette situation, nous souhaitons attirer votre attention sur cette question et vous demandons ce qui suit :
1) À la suite des processus mondiaux et régionaux menés par la FAO au cours des dernières années, il est clair que l’agroécologie est au cœur d’un modèle d’agriculture durable qui est toujours pratiqué et promu par les petits producteurs alimentaires comme la solution la plus viable à l’insécurité alimentaire et au changement climatique.
2) Les conférences et symposiums mondiaux et régionaux de la FAO ont maintenu une approche globale de l’agroécologie. De même, nous pensons que ce serait l’approche la plus favorable à adopter pour le rapport du groupe d’experts de haut niveau, garantissant que le thème reste tel qu’il a été présenté, conformément aux demandes des organisations mondiales, régionales et nationales de petits producteurs de denrées alimentaires qui participent au CSA par l’intermédiaire du Mécanisme de certification.
3) A cet égard, nous vous demandons de soutenir l’option qui maintient intacte l’intégrité de la proposition originale. Nous pensons qu’il est grand temps que tous les membres et participants du CSA – sur la base d’un rapport du HLPE – engagent une conversation sur l’agroécologie, qui est extrêmement pertinente pour des centaines de millions de petits producteurs alimentaires et, plus largement, pour la réalisation progressive du droit à une alimentation adéquate.
4) Nous pensons qu’il est inacceptable qu’un petit nombre d’acteurs tente d’entraver une discussion sur un concept et une pratique qui sont d’une grande importance pour la production alimentaire à petite échelle et la sécurité alimentaire en général. En outre, il ne serait pas judicieux d’associer ou de subordonner l’agroécologie à d’autres concepts et pratiques qui répondent à d’autres logiques ou à des intérêts opposés et poursuivent des objectifs divergents, tels que l’intensification de l’agriculture industrielle, l’expansion des monocultures axées sur l’exportation ou l’utilisation excessive d’intrants chimiques dans la production alimentaire.
5) Nous soulignons que l’agroécologie offre des solutions gagnant-gagnant, une productivité accrue, une restauration et une utilisation plus efficace des ressources naturelles. Les systèmes agroécologiques sont mieux à même de surmonter les problèmes critiques auxquels le système alimentaire mondial est actuellement confronté, car ils fournissent des solutions qui peuvent être appliquées à différents contextes en combinant les connaissances locales, la praxis et l’innovation avec les connaissances scientifiques, garantissant ainsi l’utilisation durable des ressources naturelles.
6) Au cours des dernières décennies, une grande quantité d’expériences et de connaissances a été générée, ainsi que des recherches et des analyses effectuées par des universitaires, des producteurs et des organisations gouvernementales et intergouvernementales, qu’un rapport du groupe d’experts de haut niveau peut mettre en évidence par une analyse exhaustive et actualisée.
7) Le rapport du groupe d’experts de haut niveau alimentera un débat approfondi et servira de base à un processus de convergence des politiques du CSA qui se conclura par des recommandations politiques du CSA en 2019.
Nous considérons que cette proposition est d’une grande pertinence pour le Canada, non seulement en raison des importantes contributions au développement et à la recherche que le Canada a apportées à l’agriculture durable dans de nombreuses régions du monde, mais aussi en raison du besoin urgent de travailler sur l’agriculture durable et les systèmes agroécologiques ici au Canada. La production agricole au Canada devra évoluer afin de respecter les engagements en matière de changement climatique pris dans le cadre de l’Accord de Paris. Les fermiers, les chercheurs, les décideurs politiques et les autres acteurs de l’agriculture bénéficieront grandement des connaissances et de l’analyse que le rapport du groupe d’experts de haut niveau sur « l’agroécologie au service de la sécurité alimentaire et de la nutrition » produira.
Nous vous remercions sincèrement de prêter attention à nos réflexions, qui sont le fruit d’une discussion avec des organisations qui travaillent sur l’agroécologie depuis plusieurs décennies à tous les niveaux.
Nous espérons pouvoir compter sur votre soutien à la proposition faite au CSA, en accord avec l’appui que vous avez accordé dans le cadre de la FAO au niveau régional et mondial.
Je vous prie d’agréer, Madame, Monsieur, l’expression de mes salutations distinguées,
Jan Slomp
Président,
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