contribution à la consultation publique du ministère des Finances du Canada, 29 septembre 2017.
The () se réjouit de l’occasion qui lui est donnée de contribuer à la consultation publique du ministère des Finances sur la planification fiscale à l’aide de sociétés privées.
Le site est une organisation agricole nationale non partisane, à adhésion directe et volontaire, composée de milliers de familles d’agriculteurs de tout le Canada qui produisent une grande variété de produits alimentaires, notamment des céréales, du bétail, des fruits et des légumes. Fondée en 1969, l’association travaille à l’élaboration de politiques économiques et sociales qui maintiendront l’exploitation agricole familiale en tant que principale unité de production alimentaire au Canada. Le site est un chef de file dans la défense des intérêts des exploitations agricoles familiales du Canada, dans l’analyse de la crise du revenu agricole et dans la proposition de solutions abordables, équilibrées et novatrices qui profitent à tous les citoyens.
Dans nos commentaires, nous aimerions replacer le débat public autour de cette consultation dans un contexte utile, car les préoccupations concernant l’avenir de l’exploitation agricole familiale ont souvent été mises en avant dans les médias. Nous pensons que ces préoccupations ont été exagérées.
1. La plupart des exploitations familiales ne sont pas constituées en société et n’ont donc pas accès aux mesures de planification fiscale dont il est question ici. Selon le Recensement de l’agriculture de 2016, seules 43 457 exploitations agricoles, soit moins de 25 % des exploitations agricoles du Canada, sont des sociétés agricoles familiales.
2. Les mesures de planification fiscale affecteraient les bénéfices – c’est-à-dire le revenu net restant après le paiement de toutes les dépenses, y compris les intrants, les salaires et les traitements – et pour bénéficier de ces mesures, les bénéfices devraient être substantiels. La plupart des exploitations agricoles n’atteignent pas le niveau de bénéfice annuel d’environ 200 000 dollars qui justifierait le paiement des divers frais juridiques et comptables nécessaires pour bénéficier des mesures de planification fiscale dont il est question ici.
Selon le dernier rapport de Statistique Canada disponible (2014), le revenu net d’exploitation agricole moyen était inférieur à 50 000 dollars. Même si nous ne prenons en compte que les plus grandes exploitations (31 000 exploitations dont le revenu brut est supérieur à 500 000 dollars), leur revenu net moyen, corrigé de la déduction pour amortissement, s’élève à 72 081 dollars et, sur ce revenu, 16 420 dollars proviennent des paiements des programmes gouvernementaux.
3. Le document de consultation du ministère des Finances indique qu’en 2014, il y avait 1,8 million de sociétés privées au Canada qui pouvaient avoir accès aux mesures de planification fiscale abordées dans le cadre de ce processus de consultation. Les 43 457 exploitations familiales constituées en société au Canada ne représentent qu’environ 2,4 % des sociétés susceptibles d’être affectées par les changements.
4. L’exonération à vie des plus-values d’un million de dollars pour les fermières ne fait pas l’objet de discussions dans le cadre de ce processus de consultation. Dans les médias, de nombreux reportages irresponsables ont laissé entendre à tort que cette exonération à vie des plus-values pour les fermières était la cible de la troisième mesure de planification fiscale en question. En fait, la faille dont il est question ici concerne la capacité d’un riche propriétaire de société privée à convertir ses revenus en plus-values en faisant transiter son argent par une série de sociétés écrans.
Nous aimerions maintenant examiner certaines des questions sous-jacentes qui ont accru l’appréhension des fermières à l’égard des changements proposés au système fiscal.
Crise des revenus agricoles
Le Canada est confronté à une crise durable et persistante du revenu agricole. Le revenu brut – la valeur de ce que les fermières produisent – n’a cessé d’augmenter depuis des décennies, alors que le revenu agricole réalisé – le montant que les fermières conservent après avoir payé leurs dépenses – n’a pas augmenté. Corrigé de l’inflation, le revenu net des fermières a en fait diminué.
Les fermières sont le maillon faible de la chaîne de valeur de l’agriculture – nous sommes des preneuses de prix lorsque nous achetons des intrants et des preneuses de prix lorsque nous vendons nos produits. Les fermières manquent de revenus en raison du déséquilibre des pouvoirs sur le marché. Chaque fermiere individuel est petit par rapport aux entreprises avec lesquelles nous devons traiter ou rivaliser, qu’il s’agisse d’une multinationale céréalière, d’un conglomérat de vente au détail, d’une compagnie ferroviaire ou d’une grande entreprise de semences. Ce déséquilibre des pouvoirs ne peut pas être corrigé en faisant en sorte que les personnes fortunées échappent à l’impôt.
Le site plaide en faveur d’une politique agricole plus équitable et d’institutions fortes qui permettent aux fermières de travailler ensemble sur le marché. Veuillez consulter notre site web à l’adresse www.nfu.ca pour y trouver de nombreuses recommandations politiques qui, si elles étaient mises en œuvre, permettraient d’améliorer les revenus des fermières et des fermiers, d’accroître l’activité économique dans les communautés rurales et de renforcer l’économie canadienne.
Succession d’exploitations
Le Recensement de l’agriculture de 2016 montre que seulement 8 % des exploitations agricoles canadiennes disposent d’un plan de succession écrit. La majorité de ceux qui ont des projets transmettraient l’exploitation à un membre de leur famille. L’exonération des plus-values à hauteur d’un million de dollars facilite la succession au sein de la famille. Toutefois, nous savons également que les familles sont moins nombreuses, que les fils et les filles poursuivent souvent des carrières non agricoles tandis que les parents continuent à travailler dans l’agriculture, et que la plupart des exploitations ne rapportent pas suffisamment pour faire vivre trois générations (parents plus âgés et enfants adultes élevant de jeunes enfants). Les enfants adultes ou d’âge moyen peuvent ne pas vouloir retourner à la ferme lorsque leurs parents sont prêts à prendre leur retraite. Il y a aussi des fermières plus âgées qui n’ont pas d’enfants. L’encours total de la dette agricole du Canada avoisine les 100 milliards de dollars. Cela signifie que les fermiers qui partent à la retraite doivent généralement vendre leur exploitation pour rembourser leurs dettes et disposer d’un revenu pour vivre à la retraite.
Dans le même temps, de plus en plus de jeunes souhaitent devenir agriculteurs et leur famille n’est pas agricultrice ou n’est pas en mesure de leur transmettre des terres. La taille des exploitations a également augmenté de manière significative au cours des dernières décennies. Pour compenser la baisse des marges, il faut plus de terres pour obtenir le même revenu que par le passé. Les prix des terres agricoles ont augmenté, en partie en raison de la demande des sociétés d’investissement dans les terres agricoles qui spéculent sur de nouvelles hausses de prix tout en percevant des loyers en espèces de la part des agriculteurs. Les barrières à l’entrée pour les jeunes fermières sont énormes.
Nous aimerions qu’une véritable stratégie nationale de succession des terres agricoles soit mise en place, qui inclue les membres non familiaux, qui aille au-delà de l’exonération des plus-values et qui protège contre les abus potentiels des personnes qui prétendent avoir l’intention de cultiver la terre, mais qui la revendent ensuite dans le cadre d’opérations spéculatives.
Nous recommandons au gouvernement du Canada et aux provinces de mettre en place des mécanismes de transfert de terres entre les générations de familles d’agriculteurs qui ne reposent pas sur des prêts et des paiements d’intérêts. Les gouvernements doivent trouver des moyens permettant aux jeunes et aux nouveaux fermiers d’accéder en toute sécurité à des terres agricoles sans devoir s’endetter massivement. Ces mécanismes pourraient inclure
- Des fiducies foncières et des banques foncières appartenant à la collectivité afin de garantir la production alimentaire par les fermiers locaux.
- Les options de financement communautaire (qui conservent les intérêts payés au sein des communautés locales).
- Les agences gouvernementales qui soutiennent les options de financement des vendeurs. (Les vendeurs et les acheteurs pourraient s’autofinancer, et le rôle de l’agence gouvernementale serait d’intervenir dans les rares cas où les transactions tournent mal et où il est nécessaire de restituer le terrain au vendeur).
- Un plan d’assurance-revenu pour les fermières débutantes afin de les aider à s’établir et de favoriser leur réussite à long terme.
- Un programme d’épargne-retraite ou un régime de retraite spécialement conçu pour les fermières, qui leur permettrait de ne pas dépendre de la vente de leurs terres pour financer leur retraite.
Nous pensons qu’il vaut la peine d’étudier une augmentation du montant de l’exonération à vie des plus-values pour les fermiers à la lumière de l’augmentation des prix des terres agricoles, mais seulement s’il existe des contrôles efficaces pour empêcher les sociétés d’investissement dans les terres agricoles et les acheteurs étrangers de continuer à accumuler des terres et à promouvoir la spéculation. Pour plus d’informations à ce sujet, consultez le rapport Losing Our Grip – 2015 Update.
Nous aimerions que le système fiscal en général soit plus équitable. Les mesures proposées dans cette consultation n’abordent pas les nombreuses stratégies utilisées par les grandes entreprises pour éviter de payer leur part d’impôts (par exemple, payer des options d’achat d’actions à leurs PDG et structurer leur entreprise de manière à ce que la plupart de leurs bénéfices soient placés dans des abris fiscaux extraterritoriaux au lieu d’être imposés au Canada). Nous demandons instamment au gouvernement de modifier la loi relative à l’impôt sur le revenuet d’utiliser d’autres outils pour veiller à ce que les grandes entreprises et leurs actionnaires paient également leur juste part d’impôts.
Respectueusement soumis par
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