Le projet de loi C-18, la loi sur la croissance de l’agriculture – une croissance pour qui ?
par Jan Slomp
Le9 décembre 2013, le projet de loi omnibus C-18, la Loi sur la croissance de l’agriculture, a été présenté au Parlement en première lecture. L’adoption du projet de loi C-18 permettrait au Canada de se conformer à l’UPOV 91, une forme de protection des obtentions végétales beaucoup plus restrictive que celle dont nous disposons actuellement. La deuxième partie de la loi préparera le régime réglementaire du Canada à l’approbation accélérée des additifs pour l’alimentation animale ou humaine, des médicaments ou d’autres inventions qui sont déjà approuvés dans les juridictions avec lesquelles nous commerçons. Le projet de loi C-18 permet également aux fermières de bénéficier de paiements anticipés pluriannuels garantis par des récoltes en stock ou cultivées à l’avenir.
Après une vague d’opposition des fermiers à l’adoption de l’UPOV 91 en 2005, le gouvernement libéral de l’époque l’a laissée mourir discrètement, car il est devenu évident que les fermiers verraient leur capacité à conserver, réutiliser, échanger et vendre des semences considérablement restreinte. Le public canadien a clairement demandé que les ressources génétiques restent un bien public.
Avant de réintroduire l’UPOV 91 par le biais du projet de loi C-18, le ministre de l’agriculture, M. Ritz, a activement répandu le mythe et a réussi à convaincre de nombreuses organisations agricoles et groupements de producteurs que la conservation des semences était inscrite dans ce projet de loi. Il est évident que l’UPOV 91 donne aux sélectionneurs de plantes beaucoup plus de « droits » et d’outils pour la collecte de redevances, tandis que le droit des fermières à conserver leurs semences est réduit à un simple « privilège ». Un privilège était généralement accordé aux paysans par les seigneurs féodaux et pouvait être retiré de manière arbitraire et imprévisible.
Un examen plus approfondi du texte du projet de loi C-18 révèle qu’il y est effectivement question de la capacité d’un fermier à conserver des semences. Toutefois, pour stocker les semences conservées, le fermiere a besoin de l’autorisation du détenteur du droit d’obtenteur (DOA), qui peut ou non lui être accordée. Bien entendu, l’éleveur a également le droit de percevoir des redevances.
En fait, le projet de loi C-18 permet également au gouvernement de supprimer, de restreindre ou de limiter le privilège de conservation des semences des fermières en adoptant des règlements, un processus qui peut se dérouler rapidement et sans débat public.
L’UPOV 91 contient de nombreuses dispositions relatives à la perception des redevances après la récolte, lorsque les semences sont nettoyées dans des installations de nettoyage des semences ou lorsqu’une récolte quitte l’exploitation pour être vendue dans des silos ou d’autres points de transaction, au cours de l’année de la récolte ou de toute autre année ultérieure.
Le Canada doit rejeter l’UPOV 91 et rejeter le projet de loi C-18. Nous devrions plutôt renforcer nos programmes publics de sélection végétale. Grâce à la poursuite de l’allocation des cotisations des fermières, il y aura suffisamment de fonds pour le développement des variétés essentielles. Il n’est absolument pas nécessaire d’accorder aux sélectionneurs transnationaux davantage d’outils pour soutirer des fonds excessifs aux fermières. L’adoption de l’UPOV 91 peut entraîner certaines améliorations génétiques des cultures, mais à des coûts nettement plus élevés que ceux d’un système public de sélection, qui profite à l’ensemble de l’économie canadienne. L’UPOV 91 entraînerait des coûts nettement plus élevés pour les fermières et une augmentation des bénéfices pour Bayer, Monsanto, Dow et Syngenta et d’autres entreprises de semences et de produits chimiques dont le siège social se trouve en dehors de notre pays.
Jan Slomp est le président de . Il gère de manière holistique une ferme laitière de 65 vaches près de Rimbey, en Alberta.