Plus de 100 OSC signent une déclaration décriant l’AECG
Sommet Canada-Union européenne à Ottawa
Plus d’une centaine d’organisations des deux côtés de l’Atlantique s’opposent fermement à un accord qui enrichira les multinationales au détriment des droits des citoyens
Le sommet Canada-Union européenne, qui débute le 26 septembre à Ottawa, marquera la conclusion de la négociation de l’accord économique et commercial global AECG) entre le Canada et l’Union européenne. L’AECG implique bien plus qu’un simple commerce de marchandises ; il englobera également le commerce de nombreux services, y compris les services financiers et les services publics. En outre, l’accord couvre la coopération réglementaire, les marchés publics, l’agriculture, la protection des investisseurs et la mobilité de la main-d’œuvre. Les textes, dont on nous dit qu’ils sont définitifs, ont été soustraits à l’examen des parlementaires tout au long des négociations et ont tardé à être rendus publics. Il s’agit d’une subversion notoire de la démocratie qui vise à supprimer tout débat, mettant ainsi nos concitoyens et nos élus devant un fait accompli sans possibilité d’amendement. Comme aucun parlement n’aura pu prendre position sur les dispositions de l’accord, le sommet d’Ottawa sera essentiellement un nouvel exercice de relations publiques pour faire connaître l’accord, avec les discours et les photos habituels. La procédure d’adoption formelle suivra et l’accord entrera alors en vigueur.
Nous, organisations syndicales, fermières et féminines, groupes des Premières Nations, ONG, associations de consommateurs, groupes environnementaux, réseaux de recherche et autres organisations de la société civile, nous opposons fermement à cet accord pour les raisons suivantes :
L’AECG est une atteinte à la démocratie
Depuis des années, nous dénonçons le secret qui entoure ces négociations sur des sujets cruciaux pour l’avenir de nos sociétés et nous exigeons qu’un véritable débat public ait lieu. La nature antidémocratique des négociations se reflète à nouveau de manière spectaculaire dans ce sommet, qui célébrera l’un des accords les plus ambitieux au monde (l’AECG va bien au-delà des accords de l’OMC et de la plupart des autres accords commerciaux) avant même que les parlements ne l’aient examiné, et encore moins approuvé. La récente fuite des textes quasi finalisés nous permet de confirmer que l’AECG affectera sévèrement les citoyens des pays concernés, puisqu’il consacrera l’affaiblissement des pouvoirs des gouvernements face aux investisseurs étrangers, l’ouverture obligatoire aux entreprises privées de marchés et de services qui auraient pu rester dans le domaine public, ou encore des augmentations du coût des…
les médicaments, entre autres.
L’AECG limitera les pouvoirs réglementaires des États et donnera aux entreprises un droit de contester les futures législations et réglementations
L’un des aspects les plus troublants de l’AECG est le mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et États (ISDS), qui permet aux investisseurs étrangers de poursuivre les gouvernements s’ils adoptent des réglementations ou des législations publiques susceptibles d’affecter la valeur économique de leurs investissements ou de leurs bénéfices anticipés. Certaines entreprises ont déjà eu recours à ce type de mécanisme, réclamant des millions aux gouvernements en contestant des salaires minimums trop élevés (Veolia c. Égypte), des protections environnementales de base (Lone Pine Resources c. Canada), le retrait du nucléaire (Vattenfall c. Allemagne), des mesures protégeant la santé des citoyens (Ethyl c. Canada ou Philip Morris c. Uruguay et Australie), et même les décisions de nos tribunaux (Eli Lilly c. Canada). En effet, l’ISDS confère des droits démesurés aux grandes entreprises, affectant ainsi les politiques sociales, l’utilisation du sol et du territoire, les mesures de protection de l’environnement, les transports publics, les télécommunications, etc. Ce mécanisme permet aux entreprises de contester des modifications législatives et réglementaires légitimes et démocratiquement adoptées, limitant ainsi globalement les droits des États à réglementer et à gouverner dans l’intérêt public. En outre, l’AECG permet aux investisseurs de préserver l’ensemble de leurs recours et privilèges jusqu’à 20 ans après le retrait de l’une des parties à l’accord.
L’AECG protégera davantage les entreprises que les travailleurs
L’Union européenne aurait refusé l’inclusion de mécanismes d’application (plaintes, sanctions financières, amendes) pour assurer le respect des droits fondamentaux du travail. La formulation vague relative au travail pourrait également freiner le développement de mesures de protection sociale en les subordonnant à d’autres types de normes, voire à des initiatives privées moins contraignantes.
L’AECG limitera le rôle des États et le développement régional
Nous déplorons également le fait que les pouvoirs des gouvernements infranationaux (provinciaux, municipaux et autres) d’utiliser les marchés publics comme moyen de soutenir le développement économique aient été fortement limités. Il sera désormais interdit de fixer des seuils minimaux de contenu local pour les investisseurs, ou de favoriser les produits ou services locaux dans un grand nombre de fournitures publiques. L’AECG rendra également impossible la renationalisation des services privatisés ou le développement de nouveaux services publics.
Les avantages pour les citoyens, s’il y en a, pourraient se faire attendre un certain temps et seraient très marginaux. Selon les données de la direction générale du commerce de la Commission européenne, sept ans après l’entrée en vigueur de l’accord, l’AECG n’entraînera qu’une croissance économique de 0,09 % par an. Un résultat dérisoire qui démontre que l’AECG ne peut se justifier que pour les intérêts des grandes entreprises. Cet accord est conforme à l’idée d’accumulation et de croissance, soutenue par les investisseurs transnationaux, pour qui les profits des multinationales sont plus importants que les effets bénéfiques pour les citoyens.
Un appel à la mobilisation
Le modèle économique et politique que l’AECG fait progresser se traduira par une augmentation des inégalités, un recul considérable de notre protection environnementale et sociale, et permettra le contrôle par les entreprises transnationales de nos droits économiques, sociaux et environnementaux les plus fondamentaux. La ratification de cet accord liera nos États pour les décennies à venir, sans permettre d’envisager d’autres propositions fondées sur la coopération et la solidarité. La conclusion d’un tel accord est aussi inacceptable qu’irresponsable.
C’est donc d’une seule voix que nous exhortons les représentants élus des deux côtés de l’Atlantique, à tous les niveaux de gouvernement, à rejeter cet accord, qui a été négocié en dehors des cadres démocratiques légitimes, jusqu’à ce que l’AECG fasse l’objet d’un débat public entre toutes les composantes de la société civile canadienne et européenne.
Nous appelons à la mobilisation de tous les mouvements et organisations sociales canadiens, québécois et européens, ainsi que de tous les citoyens concernés par les effets de tels accords, afin d’exercer des pressions pour la tenue d’un débat public large et éclairé sur l’AECG. À court terme, nous invitons tout le monde à se mobiliser lors du Sommet Canada-Union européenne à Ottawa le 26 septembre à midi devant les bâtiments du Parlement canadien, et lors de la Journée d’action européenne contre le TTIP, l’AECG et le TISA le 11 octobre, et à participer activement à l’Initiative citoyenne européenne (ICE) auto-organisée au cours des prochains mois.
Enfin, nous lançons un appel à la solidarité à tous les mouvements sociaux du monde et nous nous engageons à continuer à construire avec eux l’articulation de nos luttes respectives contre les accords de libre-échange et d’investissement, qu’ils soient existants ou en cours de négociation. Nous les invitons, à travers leurs réseaux, à envisager l’organisation d’une Journée mondiale d’action contre le libre-échange et le pouvoir des entreprises au cours du deuxième trimestre 2015, dans le but de faire échec ensemble au tristement célèbre mécanisme « Investisseur-État », tout en réaffirmant la primauté des droits des peuples sur les pouvoirs débridés et l’impunité dont jouissent les entreprises multinationales.
SIGNATAIRES (au 7 octobre 2014)
EUROPE
- Alter Summit (Europe)
- Mouvement européen de l’eau (Europe)
- Fédération européenne des travailleurs des transports (ETF)
- Les Amis de la Terre (Europe)
- Transport et environnement (UE)
- Afrika Kontakt (Danemark)
- Agir pour la Paix. Bruxelles (Belgique)
- AITEC (France)
- Allianz D19-20 (Belgique)
- Zone de justice et de solidarité de CONFER (Espagne)
- Asamblea Popular del 15M Usera (España)
- Asociación contra la Exclusión ALAMBIQUE (España)
- ATTAC Agen 47 (France)
- ATTAC Albacete (España)
- ATTAC Austria (Autriche)
- ATTAC Bizkaia (España)
- ATTAC Castilla y León (España)
- ATTAC España (España)
- ATTAC France (France)
- ATTAC-Allemagne (Allemagne)
- ATTAC-Hambourg (Allemagne)
- ATTAC-Hellas (Grèce)
- ATTAC Hungary (Hongrie)
- ATTAC-Ireland (Irlande)
- ATTAC Mallorca (España)
- ATTAC région Rhein-Sieg (Allemagne)
- ATTAC Salamanca, : Castilla y León (España)
- ATTAC Vlaanderen (Belgique)
- Autre Terre (Belgique)
- Campact (Allemagne)
- Centre national des employés, CNE-GNC (Belgique)
- CFTC (France)
- CIG – Confederación Intersindical Galega (Confédération interindustrielle de la galaxie)
- Círculo Podemos de Chamberi-Moncloa (Madrid, España)
- CNCD-11.11.11 (Belgique)
- CNE (Belgique)
- Collectif citoyen IDF Non aux pétroles et gaz de schiste et de houille ! (France)
- Collectif des Faucheuses et faucheurs volontaires d’OGM (France)
- Collectifs » anti Gaz de schiste » Auzonnet, Cèze et Ganière (France)
- Collectifs Isèrois Stop aux GHRM (France)
- Confederación General del Trabajo CGT (España)
- Confédération générale du travail CGT (France)
- Coordination des luttes contre la précarité, l’emploi et l’exclusion sociale (Estado Español)
- Corporate Europe Observatory (Belgique)
- Association CRIES-Centre de ressources pour l’éthique et la solidarité Initiaves (Roumanie)
- Ecologistas en Acción (Espagne)
- Ecologistas en Acción de Segovia (España)
- Economistas sin Fronteras (Espagne)
- Ekologistak Martxan (Pays Basque)
- El Colectivo ecologista Marfull AE/ Agró (España)
- Entraide et Fraternité (Belgique)
- Euskal Langileen Alkartasuna- Union des travailleurs basques (ELA)
- Fairwatch (Italie)
- Federación de comités de solidaridad con África negra (España)
- Fondation Copernic (France)
- Forum Solidarische Ökonomie e.V. / RIPESS Europe (Allemagne)
- Freihandelsfalle / Groupe StopTTIP d’ATTAC Munich (Allemagne)
- FSU (France)
- Réseau Gènéthique Berlin / TTIP unfairhandelbar (Allemagne)
- Gure Energía, pour un nouveau modèle énergétique du pays basque (Estado Español)
- Hegoa, Instituto de Estudios sobre Desarrollo y Cooperación Internacional del País Vasco (Estado Español)
- Intersindical Valenciana (España)
- Intersindical-CSC (Catalogne)
- Keep Our NHS Public KONP (Royaume-Uni)
- L’ALFICÒS-consumo ecológico, Petrer (España)
- Mouvement ouvrier chrétien MOC (Belgique)
- Plataforma No Somos Delito (Espagne)
- Plataforma Rural (España)
- Plaza de los Pueblos, 15M Madrid (España)
- Projet Enredando de Gijón (Espagne)
- Red Ciudadana Partido X (España)
- Red de huertos urbanos comunitarios de Madrid, ReHd Mad ! (Espagne)
- Red huertos comunitarios de Madrid (España)
- Solidarité (France)
- StopTTIP (Royaume-Uni)
- Sud PTT (France)
- Südwind (Autriche)
- Syndicat SUD Banque Populaire Caisse d’Epargne (France)
- Syndicat vida (Autriche)
- Union Fédérale d’Intervention des Structures Culturelles, UFISC (France)
- War on Want (Royaume-Uni)
- WEED – World Economy, Ecology & Development (Allemagne)
- Mouvement pour le développement mondial (Royaume-Uni)
- X.net (Espagne)
CANADA :
- Réseau pour la justice commerciale (TJN)
- Conseil des travailleurs unis du Canada
- Coalition canadienne de la chaîne maritime et d’approvisionnement
- Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes (STTP)
- Syndicat canadien de la fonction publique (SCFP)
- Common Frontiers Canada
- Communications Workers of America (CWA) Canada
- Conseil des Canadiens
- Mines Alerte Canada
- Syndicat national des employées et employés généraux du secteur public (SNEGSP Canada)
- Fédération du travail de l’Ontario
- Institut Polaris
- Union internationale des gens de mer du Canada
- Conférence canadienne des travailleurs unis
QUÉBEC :
- Réseau québécois sur l’intégration continentale (RQIC)
- Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux (APTS) / RQIC
- Alternatives / RQIC
- Association canadienne des avocats du mouvement syndical / RQIC
- Association québécoise des organismes de coopération internationale (AQOCI) / RQIC
- Attac-Québec / RQIC
- Centrale des syndicats démocratiques (CSD) / RQIC
- Centrale des syndicats du Québec (CSQ) / RQIC
- Centre international de solidarité ouvrière (CISO)
- Centre justice et foi
- Confédération des syndicats nationaux (CSN) / RQIC
- Conseil central du Montréal métropolitain (CCMM-CSN) / RQIC
- Eau Secours ! Coalition québécoise pour une gestion responsable de l’eau
- Fédération des femmes du Québec (FFQ) / RQIC
- Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec (FTQ) / RQIC
- Fédération étudiante collégiale du Québec (FECQ) / RQIC
- Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec (FIQ) / RQIC
- Front d’action populaire en réaménagement urbain (FRAPRU)
- Les AmiEs de la Terre de Québec
- Ligue des Droits et Libertés du Québec
- Mouvement d’éducation populaire et d’action communautaire du Québec (MÉPACQ) / RQIC
- Réseau du Forum social de Québec Chaudière-Appalache
- Réseau québécois des groupes écologistes (RQGE) / RQIC
- Syndicat Canadien de la Fonction Publique (SCFP)-Québec
- Syndicat de la fonction publique et parapublique du Québec (SFPQ)
- Syndicat des professionnelles et professionnels du gouvernement du Québec (SPGQ) / RQIC
- Syndicat des technologues d’Hydro-Quėbec, Section locale 957 SCFP
- Union des consommateurs
- Union paysanne / Vía campesina
INTERNATIONAL
- Internationale des Services Publics / Public Services International (ISP-PSI)
- Fédération internationale des ouvriers du transport (ITF)
- Alianza social continental ASC / Hemispheric Social Alliance HSA (Américas)
- Collectif Bilaterals.org (International)
- Réseau pour la justice dans l’investissement mondial
SOUTIEN EN DEHORS DU CANADA ET DE L’UE :
- Citizens Trade Campaign (États-Unis)
- Plataforma Interamericana de Derechos Humanos, Democracia y Desarrollo, PIDHDD Regional (América latina)
- Red de educación popular entre mujeres de Latinoamérica y el Caribe, REPEM.LAC (América latina y Caribe)
- Serpaj (Amérique latine)
- Asamblea feminismo comunitario (Bolivie)
- ATTAC-Argentine (Argentine)
- ATTAC-CADTM (Burkina)
- ATTAC-Suisse (Suisse)
- ATTAC-Togo (Togo)
- Bia’lii, Asesoría e Investigación, A.C. (Mexique)
- CADTM – AYNA (Argentine)
- Colombie ddhh (Colombie)
- Comisión Nacional de Enlace, CNE (Costa Rica)
- Communications Workers of America, CWA (États-Unis)
- Centre de la démocratie (Bolivie)
- Ecuador Decide (Equateur)
- Fundacion Solon (Bolivie)
- Institute for Agriculture and Trade Policy (États-Unis)
- Institute for Policy Studies, Global Economy Project (États-Unis)
- Instituto Latinoamericano para una sociedad y un derecho alternativos, ILSA (Colombie)
- Association internationale des machinistes et des travailleurs de l’aérospatiale / AFL-CIO (États-Unis)
- Les jeunes face au G20 (Mexique)
- Jóvenes por Iztapalapa (Mexique)
- Otros Mundos A.C./Chiapas (Mexique)
- Pueblos en camino (Colombie)
- PAPDA (Haïti)
- Red ecológica de Chile (Chili)
- Red mexicana de acción frente al libre comercio, RMALC (Mexique)
- Red Nacional Género y Economía, REDGE (Mexique)
- Unidad Ecológica Salvadoreña. UNES (El Salvador)
- Washington Fair Trade Coalition (États-Unis)
LE SOUTIEN DES PARTIS POLITIQUES
- Confederación Pirata (Espagne)
- Europe Écologie les Verts
- Izquierda Unida (España)
- Mouvement VEGA (Belgique)
- Parti de Gauche (France)
- Partido Comunista de España
- Délégation de PODEMOS au Parlement européen