L’UNF demande au Premier ministre d’aborder les crises agricoles dans le cadre de son mandat
Monsieur le Premier ministre Trudeau
La Nationale des Fermiers tient à vous adresser ses félicitations pour votre réélection, ainsi qu’à tous les députés nouvellement élus et réélus. Nous remercions également tous les candidats qui ont participé à l’élection.
La politique agricole est fondamentale pour le bien-être économique, social et environnemental du Canada. Nous nous rendons aux urnes une fois tous les deux ans, mais nous mangeons trois fois par jour, et les fermières s’occupent de leurs terres, de leurs cultures et de leur bétail 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7. Seule organisation agricole nationale à adhésion volontaire, la Nationale des Fermiers représente les fermiers de toutes les provinces et de deux territoires, et dont les exploitations produisent toute la gamme des produits agricoles dont dépendent nos communautés et nos clients à l’exportation. Aujourd’hui, nous souhaitons vous présenter nos principales priorités et recommandations pour le mandat du prochain ministre de l’agriculture.
Les Canadiens comptent sur votre gouvernement pour remédier avec sagesse et équité aux faiblesses du système alimentaire mises en évidence par la pandémie, inverser la perte de biodiversité dans nos paysages agricoles, réduire considérablement les émissions de gaz à effet de serre provenant de l’agriculture et aider les agriculteurs à s’adapter à la crise climatique, reconstruire la prospérité rurale en s’attaquant à l’inégalité massive et croissante dans la répartition des revenus agricoles et du revenu net, et remédier à la perte alarmante de fermiers en rendant l’agriculture à la fois possible et attrayante pour la prochaine génération. Le prochain cadre stratégique fédéral-provincial-territorial pour l’agriculture sera un outil puissant pour atteindre ces objectifs. Nous avons défini nos priorités pour le prochain cadre stratégique dans notre lettre de juin 2021 envoyée à tous les ministres de l’agriculture du Canada.
Le changement climatique sera une priorité absolue pour ce Parlement. L’UNF, en tant que membre fondateur de Farmers for Climate Solutions, vous demande instamment d’accélérer la mise en œuvre d’actions concrètes et efficaces pour protéger le climat de la planète, y compris la mise en œuvre rapide de la réduction des émissions de gaz à effet de serre dans les exploitations agricoles, notamment l’objectif de réduction de 30 % des émissions d’engrais annoncé précédemment. Les solutions climatiques doivent soutenir les moyens de subsistance des agriculteurs canadiens, encourager les innovations menées par les fermières dans le domaine de la production à faible consommation d’intrants et renforcer les capacités de nos institutions publiques de recherche et de nos agronomes vulgarisateurs. Ils doivent également reconstruire l’infrastructure du système alimentaire régional afin que nos fermières puissent fournir une plus grande partie des aliments consommés par les Canadiens. Cela renforcera les économies locales, les marchés intérieurs et la sécurité alimentaire, ce qui sera essentiel au moment où nous sommes confrontés à une crise climatique mondiale.
Les éleveurs de bétail du Canada sont confrontés à des pressions sans précédent en raison de l’impact de la pandémie sur les entreprises de transformation de la viande et des pénuries d’aliments pour animaux liées à la sécheresse. La grave pénurie de capacités d’abattage locales et régionales a placé de nombreux fermiers dans une situation impossible. Pourtant, l’agriculture animale est un élément important des systèmes alimentaires locaux et des systèmes agricoles régénératifs et agroécologiques. Un mandat ministériel visant à aider un plus grand nombre d’abattoirs titulaires d’une licence provinciale à créer et à maintenir des entreprises viables fera progresser les objectifs de votre gouvernement en matière de sécurité alimentaire, d’atténuation du changement climatique, de création d’emplois et de développement économique rural.
Les Canadiens reconnaissent également l’importance cruciale de la gestion des approvisionnements. Avant les élections, nous nous sommes réjouis du soutien multipartite apporté au projet de loi C-216 qui, s’il est adopté, empêchera les négociateurs commerciaux canadiens de concéder des parts de marché au secteur de la gestion de l’offre dans le cadre de futurs accords commerciaux. Nous vous demandons instamment de maintenir cette position, de défendre vigoureusement le secteur laitier canadien face au défi commercial actuel des États-Unis et de collaborer avec les offices provinciaux de commercialisation afin d’améliorer les possibilités offertes aux nouveaux arrivants, à la transformation à la ferme, aux systèmes de production alternatifs et à la commercialisation directe des produits soumis à la gestion de l’offre. À cet égard, nous vous invitons à lire le document de discussion de l’UNF
Renforcer la gestion de l’offre : Défendre le contrôle canadien de notre espace de marché et faire progresser la souveraineté alimentaire
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Peu avant le déclenchement des élections, les ministres de l’agriculture, de la santé et de l’environnement se sont engagés conjointement à accroître le financement de la recherche indépendante sur les pesticides et à mettre en place un plan de consultation du public sur la loi relative aux produits antiparasitaires (2002) afin d’étudier les moyens d’équilibrer la manière dont les procédures d’examen des pesticides sont lancées et d’accroître la transparence. Il est essentiel que cette révision de la loi donne la priorité au principe de précaution et qu’elle soit menée dans l’intérêt du public, sans la participation des groupes de pression du secteur des pesticides. En outre, le mandat du ministre devrait inclure l’engagement explicite de défendre les valeurs de transparence et d’indépendance par rapport à l’influence des intérêts des entreprises dans toutes les responsabilités réglementaires relevant de son portefeuille.
Lors de la préparation des lettres de mandat, nous espérons que le ministre de l’agriculture pourra être dirigé vers :
- veiller à ce que la réduction des émissions et l’adaptation au climat soient des priorités absolues lors des négociations du prochain cadre stratégique pour l’agriculture (2023-28) et à ce que les dépenses fédérales, provinciales et territoriales à l’appui des politiques climatiques et des programmes agroenvironnementaux représentent une part plus importante du prochain cadre ;
- préserver la gestion de l’offre d’une nouvelle érosion lors de la négociation d’accords commerciaux et encourager les offices de commercialisation à créer davantage de possibilités de participation pour les nouveaux arrivants et les négociants directs ;
- collaborer avec les provinces pour accroître le nombre, la capacité et la viabilité des abattoirs locaux et régionaux titulaires d’une licence provinciale, en tant qu’infrastructure essentielle de notre système alimentaire national ;
- préserver nos réglementations agricoles des influences des entreprises, garantir la transparence et le soutien de nos régulateurs publics, des scientifiques indépendants et des instituts de recherche publics afin de servir l’intérêt public ; et
- veiller à ce que l’approche de précaution et la science indépendante (non industrielle) soient prioritaires lors de l’examen des modifications de la loi sur les produits antiparasitaires.
Les multiples crises qui se présentent à nous sont pleines de dangers. Ce Parlement sera confronté à des défis sans précédent, mais il a également la possibilité de gouverner de manière à rassembler les Canadiens dans la solidarité pour faire face à ces problèmes complexes. Nous vous invitons à écouter attentivement la diversité des voix rurales et urbaines dans toutes les régions et à vous appuyer sur les points forts que nous avons à offrir. Nous vous remercions de l’attention que vous portez à nos préoccupations et à nos priorités.
Je vous prie d’agréer, Monsieur le Président, l’expression de mes sentiments distingués.
Katie Ward,
Président de la Nationale des Fermiers Union
**Traduction soutenue par Patrimoine Canada