National | Communiqué de presse

Recommandations de l’UNF pour résoudre les problèmes de transport des céréales au Canada

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Le texte suivant a été envoyé au ministre des Transports, Marc Garneau, le 23 mars 2016 :

Le transport ferroviaire des céréales des Prairies est un élément essentiel de l’économie canadienne. Les conséquences de son succès ou de son échec se mesurent en milliards de dollars par an. Les coûts des dysfonctionnements sont démesurément supportés par les fermières qui sont obligées d’accepter des prix inférieurs pour leurs produits et de payer des frais de stockage, de fret et de surestarie plus élevés pour les acheminer vers le marché. Les compagnies céréalières sont des négociants sur marge. Leurs bénéfices ne dépendent pas du prix réel des céréales, mais de la différence entre le prix qu’ils paient aux fermières pour les céréales et le prix qu’ils obtiennent lorsqu’ils les vendent à l’utilisateur final. Ils peuvent réduire le prix payé aux fermières pour couvrir les frais de transport et de stockage grâce à la « base » qu’ils peuvent appliquer aux livraisons de céréales aux silos de collecte. Ainsi, les compagnies céréalières sont des expéditeurs qui peuvent se décharger sur les fermières de tous les coûts liés à un mauvais service ferroviaire. Les fermières n’ont aucun recours, car le volume des céréales et la distance qui les sépare du marché les rendent captives du transport ferroviaire.

Les deux principales compagnies ferroviaires et les quatre plus grandes sociétés céréalières utilisent leur capacité à contrôler l’accès et l’utilisation des infrastructures critiques pour garantir leur propre rentabilité, indépendamment de la taille et de la qualité des récoltes, des conditions météorologiques, des installations de stockage ou de la capacité de déchargement des terminaux. Ainsi, la déréglementation ne se traduira pas par une augmentation des investissements, mais par un contrôle accru et des profits plus élevés pour ces entreprises dominantes.

Le système de transport des céréales du Canada aura toujours des limites d’infrastructure en raison de nos saisons et de la géographie de notre pays. Une utilisation efficace de l’infrastructure disponible est possible, comme on l’a vu dans le passé, et pourrait être réalisée à nouveau grâce à une autorité qui a le pouvoir de répartir la demande de pointe tout au long de l’année et de veiller à ce que les terminaux portuaires moins attrayants sur le plan commercial (Thunder Bay et Churchill, par exemple) soient utilisés de manière stratégique.

Le transport et la commercialisation des céréales sont si fondamentalement interdépendants qu’ils doivent tous deux être pris en compte pour améliorer l’efficacité, réduire les coûts totaux du système et accroître l’équité. Les difficultés rencontrées lors de l’acheminement de la récolte exceptionnelle de 2013-2014 ont mis en évidence les conséquences de la suppression des fonctions de commercialisation ordonnée et de coordination logistique qui étaient auparavant assurées par l’organisme unique de commercialisation du blé au Canada. Les mêmes problèmes persistent et, bien que moins visibles l’année dernière, les fermières paient toujours trop cher pour le transport et reçoivent trop peu pour leurs céréales. Les bénéfices excédentaires obtenus par les chemins de fer et les compagnies céréalières reviennent à leurs propriétaires et actionnaires urbains et étrangers. En revanche, si les systèmes de transport et de commercialisation des céréales étaient réparés, les fermières recevraient un juste retour sur leur production, qui s’ajouterait à l’économie canadienne par le biais des dépenses de consommation et de l’investissement dans le capital agricole.

Certaines améliorations du système peuvent être réalisées assez rapidement par l’intermédiaire du ministère des transports. D’autres améliorations nécessiteront la coopération d’autres ministères et/ou une nouvelle législation. Les recommandations 1 à 3 sont des mesures initiales nécessaires. La recommandation 4 s’appuierait sur les autres recommandations, les compléterait et/ou en remplacerait certains aspects lorsqu’elle serait mise en œuvre à l’avenir.

Recommandation 1 : Mettre en place une agence dotée de pouvoirs d’exécution pour obliger les chemins de fer à respecter leurs obligations en matière de transport de céréales et autorisée à appliquer des sanctions en cas de non-respect de ces obligations.
Agence proposéeMandat:
Mode de constitution :

  • Mandatée pour coordonner l’expédition des céréales afin d’atteindre un niveau de service équitable pour les fermières, quelle que soit leur taille ou leur localisation, de minimiser le temps de transit et de maximiser le débit de la ferme à l’utilisateur final via le navire au port, le transformateur national ou le point d’exportation (pour les expéditions vers les États-Unis).
  • Un tiers parti indépendant composé d’une majorité d’élus fermiers.
  • Rapports au Parlement.

Fonctions :

  • Utilise les données relatives au volume des récoltes pour fixer des objectifs et assurer la coordination entre les chemins de fer, les silos, les chargeurs de wagons de producteurs et les terminaux afin de garantir le transport en temps voulu des céréales du silo national au navire dans le port, au transformateur national ou au point d’exportation (pour les expéditions à destination des États-Unis).
  • collabore avec la Commission canadienne des grains pour veiller à ce que les transformateurs et les usines d’aliments pour animaux du pays soient servis de la même manière que les clients à l’exportation.
  • prévoit un arbitrage pour garantir la mise en place de contrats d’interconnexion efficaces, raisonnables et économiquement viables, de sorte que tous les expéditeurs de la région d’interconnexion puissent être desservis par toutes les compagnies de chemin de fer disponibles.
  • Moniteurs :
    • Repérage, déplacement, localisation et livraison des wagons à tous les terminaux portuaires afin d’assurer un déplacement efficace et d’éviter que les wagons ne soient mis de côté ou détournés.
    • Chargement des navires dans les terminaux portuaires.
  • Rend compte publiquement des éléments suivants via le site web et l’application pour smartphone :
    • Repérage, mouvement, localisation et livraison des wagons en temps réel.
    • Données hebdomadaires sur le nombre de navires en attente, les noms des navires en attente depuis plus d’une semaine et les dates de chaque accostage par navire et par terminal.
    • Performance de repérage des wagons (% de la cible) pour chaque site.

Autorités :

  • Recueillir en temps utile des données précises sur le volume des récoltes.
  • Répartir la capacité des terminaux portuaires (y compris Thunder Bay et Churchill) entre tous les utilisateurs et toutes les marchandises (chargeurs de wagons de producteurs, terminaux intérieurs indépendants, sociétés céréalières individuelles ; blé, canola, avoine, lin, etc.)
  • Fixer des périodes de circulation à sens unique limitées dans le temps sur les voies ferrées afin de promouvoir un transport efficace des céréales pendant les périodes de pointe.
  • Appliquer la répartition et les horaires de repérage des wagons dans tous les silos, les terminaux intérieurs, les expéditeurs indépendants et les sites de chargement des wagons des producteurs.
  • Prélever des pénalités sur les chemins de fer en cas de manque de performance, en augmentant chaque jour les pénalités en cas de non desserte des sites de wagons de producteurs, des chemins de fer d’intérêt local et des expéditeurs indépendants.
  • Ordonner aux sociétés céréalières d’échanger des qualités similaires de céréales entre les terminaux portuaires afin de promouvoir le chargement en temps voulu des navires et la transparence des pratiques de mélange.
  • Prélever des amendes contre les compagnies céréalières pour des performances de chargement inefficaces dans le port. Les données et les amendes inciteraient les sociétés céréalières à planifier leurs expéditions de manière à maximiser le débit au port et à exiger un meilleur service de la part des chemins de fer.

Recommandation 2 :
Maintenir les droits à recettes maximales (MRE, ou « plafond de recettes »),

en procédant à un examen complet des coûts dans un délai de 18 mois

Les chemins de fer ont l’obligation légale de fournir des services en tant que transporteur public. Les chargeurs captifs ont besoin d’être protégés contre les pratiques tarifaires monopolistiques des chemins de fer. L’augmentation des recettes des chemins de fer n’améliorera pas le service, car les producteurs de céréales sont des expéditeurs captifs. Les chemins de fer transporteront d’abord les marchandises non captives et feront attendre les céréales, quel que soit le taux de fret. Lorsque le plafond des recettes a été introduit, les compagnies ferroviaires ont affirmé qu’elles n’auraient pas besoin de la totalité des recettes prévues, mais elles ont rapidement réclamé la totalité de ces recettes et les ont souvent dépassées.

  • Le plafonnement des recettes est nécessaire pour empêcher l’application de taux de fret prédateurs aux céréales.
  • Une révision complète des coûts est nécessaire pour accroître la transparence et rétablir l’équité de l’EMR à la lumière de la restructuration significative du système ferroviaire depuis la précédente révision des coûts. Les formules de révision des coûts doivent être repensées pour permettre des ajustements à la baisse des taux dans les situations où les prix des éléments de coût diminuent.
  • Un mécanisme d’arbitrage est nécessaire pour traiter les écarts de prix et de niveau de service.
  • Les petits expéditeurs doivent avoir accès à la justice par le biais d’une alternative moins coûteuse aux tribunaux pour contester efficacement les tarifs déraisonnables que les chemins de fer utilisent pour établir une discrimination indue entre les sites et réduire ainsi le service à des fins de réduction des coûts.

Recommandation 3 : Améliorer l’accès des voitures de producteurs aux transports

L’accès au chargement des wagons de producteurs est un élément essentiel du système de transport des céréales garanti aux fermières par la loi sur les céréales du Canada. La capacité des wagons de producteurs à faire face à la concurrence, et donc à modérer les niveaux de tarifs pratiqués par les compagnies céréalières, est obtenue en garantissant que les wagons de producteurs sont également transportés et déchargés efficacement à la destination du wagon.

Améliorer l’accès des voitures de producteurs aux transports :

  • Augmenter le nombre de sites de chargement de voitures de producteurs, en particulier dans les zones mal desservies
  • Garantir l’accès des wagons de producteurs aux installations de déchargement dans tous les terminaux

Recommandation n° 4 : création d’un guichet unique pour le blé

Au nom des fermières, l’organisme de vente à guichet unique serait habilité par la loi à commercialiser la totalité du blé vendu chaque année pour l’exportation ou pour la consommation humaine à l’intérieur du pays. L’agence à guichet unique connaîtrait la qualité et la quantité produites dans toutes les régions du Canada, aurait la capacité de collecter les produits dans les campagnes de manière ordonnée, de les mélanger pour répondre aux spécifications des clients et serait en mesure de communiquer efficacement les besoins en matière de transport afin de coordonner les mouvements avec les ventes, de sorte que les meuniers et les transformateurs de produits alimentaires nationaux puissent être approvisionnés et que les cargos lacustres et les navires de haute mer puissent être chargés sans délai.

L’agence de vente à guichet unique serait un expéditeur au sens de la loi sur les transports au Canada et aurait donc qualité pour agir en cas de litige avec un chemin de fer.

La propriété effective des fermières sur le blé s’étendrait de la ferme au client final (un propriétaire effectif a le droit de bénéficier de la propriété du bien en question même si le titre de ce bien est au nom d’une autre personne, généralement dans des situations où l’autre personne agit en tant qu’intermédiaire pour le compte du propriétaire effectif).

L’agence de vente à guichet unique serait :

  • Établi et habilité par la loi
  • Contrôle démocratique par des directeurs fermiers élus
  • Les bénéfices non distribués sont interdits – tous les bénéfices moins le coût des ventes sont reversés aux fermières chaque année.
  • L’audit annuel est présenté au Parlement et publié sur le site web dans les 90 jours suivant la fin de l’année fiscale.

RÉSULTATS :

La mise en œuvre des recommandations ci-dessus permettrait aux fermières des Prairies d’avoir un accès équitable à un transport de céréales efficace, en temps voulu et à un coût raisonnable, indépendamment de la taille ou de la localisation de l’exploitation, et de commercialiser de manière ordonnée la plus grande récolte du Canada. Les résultats spécifiques seraient les suivants :

Un niveau de service agrégé pour les fermières

  • Les données relatives à l’estimation du volume des récoltes permettraient à l’agence de logistique céréalière de répartir la capacité portuaire entre les utilisateurs et de fixer des objectifs d’expédition contraignants pour chaque région de culture (limites à déterminer). Cela permettrait d’éviter les goulets d’étranglement et les coûts qui en découlent.
  • Les expéditeurs plus petits et indépendants auraient un accès équitable et rapide aux emplacements de wagons, ce qui se traduirait par un marché plus diversifié et un choix plus large pour les fermières.
  • Les périodes de trafic à sens unique limitées dans le temps augmenteraient la capacité de pointe du système ferroviaire et réduiraient la nécessité d’investir dans des capacités qui ne seraient pas nécessaires chaque année, libérant ainsi des ressources pour d’autres types d’investissements.
  • Les mauvaises performances des chemins de fer seraient minimisées, car le pouvoir des chemins de fer serait contrebalancé par le poids de l’agence responsable de l’ensemble du trafic des céréales et des oléagineux.

Producteur viable Transport de voitures

  • Les chargeurs de wagons des producteurs faisaient en sorte que leurs wagons soient repérés en temps voulu.
  • Les wagons de producteurs auraient accès au marché dans les terminaux portuaires.
  • Les chemins de fer d’intérêt local auraient des contrats d’interconnexion équitables qui leur permettraient de fournir des services aux expéditeurs de wagons de producteurs le long des embranchements.

Expéditeurs indépendants viables

  • Les expéditeurs indépendants se verraient garantir un accès aux installations portuaires en temps voulu et à un prix raisonnable.
  • Les expéditeurs indépendants verraient leurs wagons repérés en temps utile, ce qui leur permettrait de contribuer à la diversité et à la vitalité de l’économie canadienne.

Des revenus équitables pour les fermiers, un meilleur service pour les clients

  • La totalité du produit des ventes de céréales, déduction faite des frais de fonctionnement, serait reversée chaque année aux fermières.
  • Toute l’appréciation de la chaîne de valeur – depuis les semences développées par les sélectionneurs de plantes jusqu’à l’assemblage et au transport efficaces des cargaisons selon les spécifications du client – reviendrait aux fermières à chaque campagne agricole.
  • Le Canada retrouverait à la fois ses revenus et sa réputation de fournisseur de céréales de haute qualité.
  • Les meuniers et les transformateurs de produits alimentaires nationaux obtiendraient un approvisionnement sûr et en temps voulu ; les consommateurs bénéficieraient d’un meilleur accès aux produits alimentaires canadiens.