Le CSA progresse dans le domaine du climat, mais il doit être largement transformateur
Lettre ouverte de l’UNF
Introduction
Il y a deux semaines, les ministres fédéral, provinciaux et territoriaux de l’agriculture (FPT) se sont réunis à Saskatoon et ont conclu un accord de principe pour s’engager dans un Cadre stratégique pour l’agriculture (CSA) d’une durée de cinq ans. L’objectif déclaré du CSA – rebaptisé Partenariat pour une agriculture durable au Canada – est de fournir des orientations politiques afin que le Canada soit un chef de file en matière d’agriculture durable sur les plans environnemental, économique et social.
Le dernier CSA ne répond que partiellement à ces objectifs louables et urgents. La Nationale des Fermiers (UNF) craint que le cadre général ne soit pas assez ambitieux pour faire face aux risques économiques et climatiques croissants auxquels les fermiers canadiens sont confrontés. De plus, le nouveau CSA reste lié à un modèle de croissance non durable et manque d’actions concrètes pour aborder les questions qui se chevauchent de l’inclusion et de l’inégalité, de la crise climatique et de la résilience des fermières.
Néanmoins, l’UNF est encouragée par les développements prometteurs au sein de l’APF, notamment :
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Une augmentation de 25 % du financement de la participation aux coûts (500 millions de dollars d' »argent frais ») pour atteindre 2,5 milliards de dollars au cours des cinq prochaines années.
L’UNF se félicite de cette augmentation du financement et de la promesse d’une amélioration de la collecte et du partage des données. Nous espérons que les connaissances scientifiques générées garantiront l’efficacité des programmes afin qu’ils profitent aux fermières, à la souveraineté alimentaire et à l’environnement. Nous sommes heureux que le financement du partage des coûts soit évalué en fonction de la réduction de 3 à 5 millions de tonnes (MT) des émissions de gaz à effet de serre (GES) et d’une plus grande diversité dans l’agriculture (voir ci-dessous). Cependant, nous sommes préoccupés par le fait que le financement du partage des coûts est également évalué par rapport à une augmentation insoutenable de 46 % des revenus agricoles et agroalimentaires (de 134,9 milliards de dollars en 2021 à 250 milliards de dollars d’ici 2028) et une augmentation de 13,5 % des revenus d’exportation du secteur (de 82,2 milliards de dollars en 2021 à 95 milliards de dollars en 2028). L’UNF estime que nous devons donner la priorité à la production équitable et durable d’aliments et de produits agricoles. L’extraction des richesses du sol canadien n’est pas illimitée. Il est temps d’abandonner l’idée d’une croissance constante pour s’attaquer aux problèmes économiques, sociaux et environnementaux auxquels le secteur agricole est confronté.
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Un engagement à réduire les émissions de GES de 3 à 5 MT d’ici 2028
C’est un début, mais c’est loin d’être suffisant. L’UNF, en tant que membre fondateur de Farmers for Climate Solutions, a présenté des propositions concrètes visant à réduire les émissions de près de trois fois ce montant au cours de la même période, sur la base d’engagements et de soutiens adéquats de la part du gouvernement fédéral. Le niveau d’engagement actuel place le Canada à la traîne en matière de réduction des émissions de GES d’origine agricole.
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L’introduction du programme de paysages agricoles résilients (RALP), doté de 250 millions de dollars, pour financer des pratiques agricoles qui conduisent à la séquestration du carbone, à l’adaptation et à d’autres co-bénéfices environnementaux.
L’UNF est encouragée par la perspective du nouveau programme de paysage agricole résilient et par son partenariat avec les juridictions dotées de programmes environnementaux et de résilience existants. Nous sommes impatients de travailler avec le gouvernement pour veiller à ce que les terres agricoles marginales et les zones humides soient maintenues et protégées, tout en respectant le besoin des fermières de gagner leur vie de manière durable. Cependant, nous sommes préoccupés par le manque de clarté des directives de qualification et par le fait qu’au lieu d’avoir un programme fédéral adéquat pour réduire les émissions de GES dans l’agriculture, le gouvernement s’appuie trop fortement sur le RALP pour atteindre ses objectifs de réduction des émissions de GES.
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Modifications du programme de gestion des risques de l’entreprise (GRE)
L’UNF est impatiente de connaître les détails des changements proposés pour les programmes de GRE, notamment l’augmentation du taux de compensation de 70 % à 80 % et l’augmentation de l’enveloppe globale de financement, bien que nous remarquions que cela ne ramène toujours pas Agri-stabilité aux niveaux antérieurs, qui soutenaient davantage les fermières. Les programmes de gestion des risques biologiques doivent inclure des exploitations agricoles diversifiées à taille humaine qui ont fait leurs preuves en matière de pratiques agricoles respectueuses de l’environnement. L’UNF soutient les mesures d’incitation liant les pratiques environnementales à Agri-investissement, mais le délai proposé est trop long et le plafond de revenus proposé autour de l’exigence d’un plan environnemental de l’exploitation agricole pour l’obtention de fonds publics de contrepartie devrait être moins élevé.
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Augmentation du nombre de bénéficiaires de fonds qui s’identifient comme des autochtones, des femmes et des jeunes.
L’UNF se réjouit de constater que des efforts supplémentaires seront consentis pour prendre en compte et mettre l’accent sur le rôle important des femmes, des populations autochtones et des jeunes dans l’agriculture, et attend avec impatience de voir les programmes conçus pour répondre à cette priorité en publiant des améliorations mesurables. L’UNF donne depuis longtemps la priorité à la représentation des femmes et des jeunes dans l’agriculture et, après avoir récemment inscrit la représentation des fermiers PANDC dans nos statuts, nous prévoyons de nous engager avec le gouvernement pour veiller à ce que les groupes qui méritent l’équité aient un siège à la table lors de l’élaboration des programmes qui affectent leurs communautés. Le CSA reste vague sur la manière dont il soutiendra les PANDC et les jeunes agriculteurs. L’UNF estime qu’il faut aller au-delà d’une simple « participation sectorielle » et apporter un soutien significatif aux PANDC et aux jeunes pour qu’ils deviennent des propriétaires et des exploitants agricoles à part entière qui disposent des outils et des ressources nécessaires pour cultiver des aliments et des produits agricoles culturellement adaptés à leurs communautés.
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Un engagement à assurer une main-d’œuvre qualifiée et fiable dans le secteur agricole.
Nous restons préoccupés par la crise de la main-d’œuvre agricole et, en tant qu’organisation qui a récemment créé une catégorie de membres travailleurs agricoles en plus de nos membres agriculteurs traditionnels, nous reconnaissons les défis inhérents à une conversation entre les fermiers qui ont besoin de maintenir un avenir financier stable pour leurs fermes et les travailleurs agricoles qui méritent un salaire équitable pour leur temps et leurs efforts. L’UNF insiste sur le fait que les travailleurs agricoles migrants sont des personnes qui méritent tous les droits et privilèges liés à la résidence permanente au Canada, y compris les droits de mobilité. Nous restons également préoccupés par le statut des travailleurs migrants dans les industries de production alimentaire, étant donné que notre durabilité en tant que secteur dépend en grande partie de leur bien-être.
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Réitération de l’engagement de réduire de 30 % les émissions dues aux engrais azotés
Le gouvernement canadien s’est déjà engagé à atteindre un objectif national de réduction des émissions d’azote de 30 % dans le secteur agricole d’ici à 2030. Agriculture et Agroalimentaire Canada (AAC) et Farmers for Climate Solutions (FCS) ont tous deux expliqué en détail comment une réduction de 30 % peut être obtenue sans réduction majeure du rendement des cultures. L’UNF soutient cet objectif progressif et à court terme, mais s’inquiète du fait que le message concernant la réduction des émissions d’engrais ne corresponde pas au niveau d’urgence de la crise climatique à laquelle nous sommes confrontés, étant donné que l’agriculture est la quatrième catégorie d’industrie la plus émettrice de gaz à effet de serre dans le pays. Les profits réalisés par l’industrie des engrais réduisent de plus en plus le revenu net des fermières. Le gouvernement devrait lancer une enquête sur les pratiques de l’industrie des engrais qui non seulement arnaque financièrement les fermières, mais encourage également la surutilisation d’engrais à base de combustibles fossiles qui sont à l’origine d’une grande partie de nos émissions de gaz à effet de serre,
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Redevances de détail, priorités réglementaires/commerce interprovincial, santé animale et commerce et accès aux marchés
Un code de conduite pour l’épicerie ne peut être laissé à l’autorégulation de l’industrie. Tous les niveaux de gouvernement doivent travailler ensemble pour enquêter sur la collusion des prix et les profits réalisés par l’oligopole de l’épicerie. Nous sommes favorables aux mesures de prévention de la peste porcine africaine (PPA) et de protection de la santé animale. Nous attendons avec impatience de connaître les détails des priorités en matière de réglementation et de commerce interprovincial et international et nous plaiderons pour qu’elles se concentrent sur la réduction des émissions de GES, protègent les fermiers et évitent d’accentuer la concentration dans le secteur agricole.
Conclusion
Les fermières assument des risques croissants dans un contexte environnemental et économique en pleine mutation. Le partenariat pour une agriculture canadienne durable a pris quelques mesures initiales pour faire face à ces risques, mais n’a pas encore pris les mesures audacieuses nécessaires pour assurer la prospérité des fermières canadiennes et l’avenir de nos petits-enfants à la ferme. L’UNF espère que la planification future au sein d’AAC et les négociations entre le gouvernement fédéral et les différents gouvernements provinciaux et territoriaux nous permettront de passer de solutions progressives à des solutions transformatrices. Il est temps de tracer une nouvelle voie courageuse. L’avenir de la production agricole ainsi que la santé, la sécurité et le bien-être de tous les Canadiens en dépendent.