National | Opinion

Le gouvernement récompense les chemins de fer

Un peu comme Brian Mulroney.

Au cours des dernières semaines du règne de 10 ans de son gouvernement, avant que les libéraux de Jean Chrétien ne prennent officiellement le pouvoir, Mulroney signe un accord avec les chemins de fer qui leur redonne le contrôle des wagons-trémies que le gouvernement fédéral a achetés pour le transport des céréales des Prairies.

Dans le cadre de cet accord d’exploitation, Mulroney a jeté un os aux chemins de fer : si le gouvernement décidait de vendre les wagons-trémies, les chemins de fer auraient un droit de préemption sur les wagons. Cet accord ne pouvait être résilié que moyennant un préavis de cinq ans aux chemins de fer.

Il n’y avait aucune raison de le faire. Le gouvernement ne devait rien aux chemins de fer.

Mais c’est une décision intelligente de la part des chemins de fer que de l’avoir inclus.

Lorsque le gouvernement libéral a annoncé en 1996 qu’il envisageait de vendre les voitures, dans le cadre de la cession de presque tout, le droit de préemption est devenu un enjeu majeur.

La coalition de groupes agricoles qui s’est regroupée sous le nom de Farmer Rail Car Coalition connaissait l’existence du droit de préemption. Son inclusion dans l’accord signifiait que les wagons finiraient entre les mains des chemins de fer si le gouvernement poursuivait la vente avant l’expiration des termes de l’accord d’exploitation.

Il a fallu attendre une décennie, mais les libéraux ont décidé de vendre les voitures à la FRCC.

Malheureusement, Transports Canada a traîné les pieds et la vente n’a pas été finalisée avant la chute du gouvernement minoritaire de Paul Martin.

Les conservateurs de M. Harper se sont empressés d’obéir aux compagnies ferroviaires et de revenir sur l’accord prévoyant que les fermières seraient propriétaires des wagons.

La semaine dernière, le ministre fédéral de l’agriculture, Gerry Ritz, a annoncé que le gouvernement avait signé de nouveaux accords d’exploitation avec le CN et le CP, leur confiant la garde et le contrôle des wagons pour une nouvelle période de dix ans.

Le gouvernement a fait bonne figure en présentant cette mesure comme une victoire pour les fermières.

Loin d’être une quelconque victoire pour les fermières, la gestion du dossier des wagons-trémies par les conservateurs représente un échec cuisant qui coûtera cher aux fermières à l’avenir.

Comme les lecteurs s’en souviendront probablement, c’est la FRCC qui a finalement convaincu le gouvernement qu’il devait agir sur un sujet qu’il connaissait déjà, à savoir que les chemins de fer surfacturaient les fermières pour l’entretien des wagons.

La FRCC a également souligné qu’en faisant appel à des offres concurrentielles pour les travaux, elle pourrait faire effectuer l’entretien à un coût bien inférieur à celui des chemins de fer.

Un autre principe du plan de la FRCC consistait à utiliser l’argent gagné lorsque les wagons ne transportaient pas de céréales pour moderniser le parc et remplacer les wagons au fur et à mesure que les anciens étaient retirés du service.

Comment le plan du gouvernement se compare-t-il à celui du FRCC, qu’il a démoli ?

Les conservateurs ont remis la maintenance au bon plaisir des chemins de fer. Il n’y aura pas d’appel d’offres et les fermières en paieront le coût.

Plus important encore, les chemins de fer remplaceront les wagons mis hors service en raison de leur âge.

Cependant, ils feront ensuite payer ces wagons aux fermières par le biais de leurs tarifs de fret. Le plafond des recettes sera ajusté pour permettre ce remplacement.

On estime que cela coûtera aux fermières au moins 4,50 dollars par tonne pour chaque tonne de céréales expédiée. Dans le cadre de la FRCC, les fermières auraient été propriétaires des voitures qu’elles avaient payées.

Un autre défaut majeur du traitement des wagons-trémies par le gouvernement est qu’il n’a pas agi pour améliorer les wagons existants. Pour un coût très faible, le gouvernement aurait pu apporter aux voitures des améliorations qui auraient prolongé leur durée de vie et augmenté leur capacité de charge.

Les conservateurs ont été invités à le faire par la FRCC et d’autres groupes agricoles, mais la fenêtre pour le faire est maintenant fermée.

En conséquence, les voitures seront moins efficaces qu’elles ne l’auraient été et seront mises hors service plus rapidement. Les fermiers commenceront alors à payer des frais de transport supplémentaires plus tôt qu’ils n’auraient dû le faire.

Le concept du FRCC est simple. Les coûts doivent être maintenus à un niveau bas. Des normes d’entretien élevées doivent être maintenues. Les fermières qui paient pour les voitures devraient en être propriétaires.

Les conservateurs ont également un concept simple. Les chemins de fer devraient pouvoir continuer à faire ce qu’ils ont toujours fait : surfacturer et mal servir les fermières.

Pour que cela ne change pas, le nouvel accord ne peut être résilié avant au moins neuf ans, et seulement pour 3 000 des quelque 12 000 voitures.

Comme Mulroney auparavant, le nouveau gouvernement du Canada veut s’assurer que les chemins de fer ne soient pas entravés dans leur droit de prendre les fermières en otage.

par Paul Beingessner

Paul Beingessner
About the author

Paul Beingessner

Paul Beingessner was a farmer, an activist, and a writer who defended Canada’s family farms until his tragic death in a farm accident in the spring of 2009. His widely-read and respected weekly columns brought a fresh and progressive perspective to rural and farm issues. Some of them are collected here. Through his words, his insight and wisdom continue to inform, raise important questions and encourage action. Working with Paul's family, the NFU has established an annual literary prize in honour of Paul and his contribution to rural and agricultural journalism.

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