Les suppléments non fertilisants (ci-après “suppléments”) sont des produits autres que les engrais qui, par une grande variété de moyens et de modes d’action, améliorent l’état physique du sol, favorisent la croissance des plantes ou augmentent les rendements. Ils comprennent les biostimulants tels que les inoculants microbiens, les acides humiques/fulviques et les extraits d’algues, ainsi que les amendements du sol tels que le biochar, le thé de compost, le fumier et la chaux. Les suppléments peuvent présenter de nombreux avantages, notamment : apports directs de nutriments ; amélioration des réponses physiologiques des plantes au stress ; stimulation de la croissance des plantes non liée à la nutrition ; protection contre les maladies ; augmentation de l’efficacité de l’utilisation des engrais (et réduction des émissions de gaz à effet de serre qui en découle) ; et modification des propriétés physiques, chimiques et biologiques du sol.
De nombreux compléments ont été utilisés de manière sûre et efficace dans l’agriculture pendant des siècles. Toutefois, étant donné que les compléments peuvent avoir de multiples ingrédients actifs et modes d’action, ils sont mieux définis sur la base des avantages qu’ils prétendent apporter à l’agriculture ; il est donc essentiel que ces allégations soient testées et que les données soient rendues publiques, afin que les fermières puissent faire des choix éclairés.
Jusqu’en 2013, le Canada disposait d’un système scientifique réglementé par le gouvernement fédéral pour déterminer si les compléments alimentaires non fertilisants étaient conformes à leur étiquette ou à leurs allégations commerciales. Pour démontrer la validité de chaque avantage revendiqué sur l’étiquette d’un produit, les entreprises étaient tenues de mener des essais répétés sur le terrain sur plusieurs sites et années (y compris des essais en laboratoire et en serre, le cas échéant). Elles devaient ensuite soumettre les résultats de leurs essais à l’Agence canadienne d’inspection des aliments (ACIA) pour validation et, une fois celle-ci obtenue, leur produit pouvait être homologué pour la vente au Canada. Ce système était tellement respecté que les entreprises basées dans d’autres pays avaient l’habitude d’enregistrer leurs produits au Canada, car le fait de dire que le produit répondait aux normes canadiennes d’efficacité augmentait l’acceptation du marché à l’étranger. Les exigences de l’ACIA en matière de tests d’efficacité pour les compléments alimentaires autres que les engrais n’ont pas été abrogées parce qu’elles ne fonctionnaient pas ; elles ont été abrogées par le gouvernement fédéral dans le cadre des réductions du budget et du mandat de l’ACIA.
Le site UNF recommande vivement de rétablir l’ancienne réglementation canadienne sur les tests d’efficacité (TE).
Pour faciliter la réintroduction de la TE, nous recommandons en outre d’augmenter le nombre d’évaluateurs de l’efficacité de l’ACIA (coût total : 1,5 million d’euros).
La réintroduction de l’ET sera peu coûteuse pour les entreprises. Des entreprises réputées mènent déjà leurs propres essais sur le terrain et en laboratoire pour évaluer l’efficacité et étayer les recommandations d’utilisation et les allégations figurant sur les étiquettes, les sites web ou les sites de commercialisation. En outre, si les frais de traitement de l’ACIA dans le cadre d’un nouveau système d’ET sont identiques à ceux du passé, ils seront très faibles : quelques centaines de dollars seulement par demande.
Bien que les coûts soient faibles, les bénéfices seront importants :
- Les fermières disposeront d’une validation et d’une quantification indépendantes des avantages revendiqués, ce qui leur permettra de prendre des décisions en fonction des coûts et des avantages et d’acheter des produits en toute confiance ;
- Les produits non performants seront retirés du marché, ce qui renforcera la confiance dans l’ensemble du secteur des compléments alimentaires ;
- Certains produits constitueront des alternatives aux engrais, permettant à certaines fermières de réduire l’utilisation de ces intrants coûteux ;
- En proposant des alternatives aux engrais, les compléments offriront des options compétitives aux fermières, contribuant potentiellement à discipliner les prix des engrais, un avantage même pour les fermières qui choisissent de ne pas essayer les compléments ;
- Les produits qui démontrent leur capacité à réduire l’utilisation d’engrais (ou à diminuer les émissions d’autres manières) pourraient éventuellement bénéficier de subventions publiques, ce qui les rendrait encore plus abordables pour les fermières et augmenterait leur adoption et leurs ventes ;
- L’augmentation des ventes et de l’utilisation pourrait accélérer le développement et la commercialisation de nouveaux suppléments et types de suppléments prometteurs ; et
- Un large éventail de fermiers pourrait bénéficier de nouvelles options de production importantes, notamment les fermiers qui souhaitent adopter une approche à faible consommation d’intrants, les agriculteurs biologiques, ceux qui recherchent une plus grande résilience ou qui veulent régénérer les sols, et ceux qui préfèrent pratiquer une agriculture reposant davantage sur les intrants biologiques et moins sur les intrants chimiques et industriels.
L’Union européenne, les États-Unis, le Brésil et de nombreux autres grands pays et régions producteurs de denrées alimentaires exigent tous des tests scientifiques pour justifier les allégations figurant sur les étiquettes des compléments alimentaires, sur les sites Internet ou dans les documents commerciaux. Ces juridictions ont maintenu leurs régimes d’ET pour garantir à leurs fermières des produits dignes de confiance, et le Canada ne devrait pas faire exception à la règle.
Le rétablissement des systèmes canadiens de TE pour les suppléments non fertilisants est une étape cruciale pour favoriser un secteur agricole plus résilient et plus durable. En rétablissant le système robuste de validation scientifique qui distinguait autrefois les normes canadiennes, nous pouvons garantir que les fermières ont accès à des produits éprouvés et efficaces qui soutiennent véritablement la santé des sols et la croissance des plantes. Cette approche permettra non seulement de renforcer la crédibilité de l’industrie des compléments alimentaires, mais aussi de faciliter l’adoption d’alternatives innovantes et respectueuses de l’environnement aux engrais conventionnels. L’agriculture canadienne bénéficiera ainsi d’une meilleure gestion des éléments nutritifs, d’une réduction des émissions et d’une tarification plus compétitive, ce qui permettra au pays d’atteindre ses objectifs en matière d’émissions nettes zéro. L’adoption d’un cadre scientifique pour la TE permettra au Canada de s’aligner sur les meilleures pratiques mondiales et donnera aux fermières la confiance et les outils nécessaires pour faire progresser les pratiques agricoles durables.