Region 6 | Lettre

Les groupes de femmes appellent à l’action dans le domaine des transports publics

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4 juillet 2017

Madame la Ministre de la Justice, Jody Wilson-Raybould et Monsieur le Ministre des Transports, Marc Garneau :

Nous vous écrivons au sujet des actions d’un gouvernement provincial qui ont des implications nationales. Nous encourageons votre gouvernement à agir sur cette question, car nous pensons que le gouvernement de la Saskatchewan effectue injustement des coupes dans des services publics essentiels qui mettent en danger la vie et le bien-être des femmes.

Le gouvernement de la Saskatchewan a fermé le seul système de transport public qui dessert les personnes vivant en dehors des villes : la Saskatchewan Transportation Company (STC). La Saskatchewan compte une forte population – 35,6 % – vivant dans des zones rurales et éloignées, ce qui rend la fermeture particulièrement difficile. Les conséquences de cette réduction pour les femmes sont graves et dépassent les compétences provinciales. Par exemple, la possibilité d’une nouvelle autoroute des larmes en Saskatchewan est bien réelle lorsque des femmes, sans accès ni choix, sont forcées de faire de l’auto-stop parce qu’elles n’ont pas d’autre alternative. Le lien entre les transports publics et les femmes autochtones disparues ou assassinées a été établi en Colombie britannique. Sur la route des larmes en Colombie-Britannique, entre 18 et 50 femmes autochtones ont disparu ou ont été assassinées, et les transports publics ont été recommandés dans plusieurs études comme un moyen majeur d’éliminer les obstacles à la sécurité des femmes. La route du nord de la Colombie-Britannique a finalement reçu des services de transport public ce mois-ci. Une plainte pour violation des droits de l’homme a été déposée par une femme autochtone à ce sujet.

L’auto-stop a augmenté dans le nord de la Saskatchewan depuis la fermeture du STC à la fin du mois de mai. Cela correspond à une étude de l’Université du Nord de la Colombie-Britannique (UNBC) qui a établi un lien entre l’auto-stop le long de la route des larmes en Colombie-Britannique et le manque de transports publics. Parallèlement à la fermeture des transports publics intra-provinciaux en Saskatchewan et malgré les discours contraires, aucune entreprise privée ne s’est portée candidate pour offrir des services publics dans le Nord. Ce désastre imminent est inadmissible en cette période de réconciliation publique et, en particulier, si le gouvernement tient compte de l’enquête nationale sur les femmes autochtones disparues et assassinées (MMIW). Le gouvernement de la Saskatchewan ne s’intéresse toutefois pas au lien entre le MMIW et l’accessibilité des transports. En effet, lorsque cette question a été soulevée à l’Assemblée législative de la Saskatchewan par le député métis Buckley Belanger, le président a mis fin au débat (voir p 2577 dans Handsard, 18 mai 2017).

En tant qu’organisations nationales et provinciales de femmes, nous tenons à ce que vous sachiez que nous prenons très au sérieux la fermeture de ce service. Nous pensons qu’elle nuit de manière disproportionnée aux femmes, et en particulier aux femmes marginalisées. Par exemple, le rapport annuel 2015-2016 de STC a montré que plus de 60 % des utilisateurs de STC étaient des femmes et que plus de 70 % d’entre eux étaient marginalisés.
Le taux de violence domestique en Saskatchewan est deux fois plus élevé que la moyenne nationale et le taux de femmes autochtones disparues ou assassinées est l’un des plus élevés au Canada. La Provincial Association of Transition Houses and Services of Saskatchewan (PATHS) établit un lien entre les taux élevés de violence domestique et le besoin de transports publics, en particulier dans les zones rurales où les taux de violence sont parmi les plus élevés. Le directeur de PATHS a qualifié le STC de bouée de sauvetage pour les femmes rurales et a déclaré que sans lui, les conséquences seraient désastreuses.

Les statistiques 2012 de Statistique Canada sur le handicap montrent qu’une personne handicapée sur cinq utilise les transports publics. Le code des droits de l’homme de la Saskatchewan reconnaît le droit à l’égalité de transport pour les personnes handicapées. Le fait qu’il n’y ait pas de services de transport pour les personnes handicapées en dehors des villes de la Saskatchewan exige l’attention du gouvernement fédéral, alors que le gouvernement provincial ignore systématiquement ce droit de l’homme.

Nous recommandons ce qui suit :

  • Qu’une attention immédiate soit accordée aux transports publics actuels en Saskatchewan et que les violations légales et éthiques soient examinées publiquement et condamnées, le cas échéant ;
  • Que vous envisagiez sérieusement de collaborer avec les députés représentant les circonscriptions de la Saskatchewan afin d’obtenir une modification des critères d’accès aux fonds d’infrastructure fédéraux, ce qui permettrait à la Saskatchewan d’avoir accès à des fonds pour le développement d’infrastructures intra-provinciales ; et
  • Que le gouvernement fédéral intervienne au nom de la réconciliation, de l’égalité et des droits de la personne pour corriger la situation de l’accès aux transports publics en Saskatchewan.

Nous sommes également conscients que des situations similaires peuvent se produire dans d’autres provinces, comme au Manitoba avec la fermeture des voies ferrées pour passagers dans le Nord, et nous demandons immédiatement que l’attention soit portée sur les politiques d’austérité qui font preuve de mépris et d’irrespect à l’égard de la vie des personnes vivant dans des régions éloignées. Canada 150 devrait inclure ce respect fondamental. Nous vous serions reconnaissants de bien vouloir consulter vos services sur cette grave question.

Je vous prie d’agréer, Monsieur le Président, l’expression de mes sentiments distingués,

Cindy Hanson, PhD
Présidente, Institut canadien de recherche sur les femmes CRIAW-ICREF Tél. : 613-422-2188 cindyhanson@sasktel.net

Jo-Anne Dusel
Directeur exécutif,
Association provinciale des maisons et services de transition de la Saskatchewan (PATHS)

Judy Hughes
Président sortant
Saskatchewan Aboriginal Women’s Circle Corporation (Société du cercle des femmes autochtones de la Saskatchewan)

Ann Batisse,
Directeur exécutif
Groupe de soutien aux femmes autochtones du Temiskaming

Lori Johb
Comité des femmes de la Fédération du travail de la Saskatchewan

Sue Delaney
Société Elizabeth Fry de la Saskatchewan

Coral Sproule – Présidente des femmes
Le conseil des femmes de l’Union Nationale des Fermiers

CC
Honorable Maryam Monsef, ministre de la condition féminine Honorable Carolyn Bennett, ministre des affaires autochtones et du développement du Nord Honorable Ralph Goodale, ministre de la sécurité publique
Amarjeet Sohi, ministre de l’infrastructure et des collectivités
Mme Carla Qualtrough, ministre des personnes handicapées
Honorable Tina Beaudry-Mellor, ministre des services sociaux et de la condition féminine, Saskatchewan
Brad Wall, premier ministre de la Saskatchewan
Fédération des nations autochtones de la Saskatchewan
Francyne Joe, Présidente, Association des femmes autochtones du Canada Chef Perry Bellegarde, Assemblée des Premières Nations Highway Traffic Board, Saskatchewan
Enquête MMIW