Policy

Droits d’obtenteur – Réponse de l’UNF au résumé de l’analyse d’impact de la réglementation

L’UNF a soumis le texte suivant au processus de consultation publique en vertu de la Gazette du Canada, partie I, volume 159, numéro 32 : Règlement modifiant le Règlement sur la protection des obtentions végétales. Ce document est structuré sous forme de réponses aux sections de l’analyse d’impact réglementaire traitant de chaque aspect de la modification réglementaire proposée. La modification réglementaire proposée supprimerait le privilège des fermiers de conserver des semences et d’autres matériels de multiplication pour produire des cultures futures de la même variété sur leurs propres exploitations pour les variétés de fruits, de légumes, de plantes ornementales et hybrides qui bénéficient de la protection des droits d’obtenteur ; elle porterait la durée de la protection des droits d’obtenteur de 20 à 25 ans pour les nouvelles variétés de pommes de terre, d’asperges et d’espèces ligneuses non arborescentes (par exemple, les baies), et réduirait les redevances et autres exigences administratives pour les entreprises qui demandent la protection des droits d’obtenteur.

Réponse de l’Union Nationale des Fermiers :

COMMENTAIRES GÉNÉRAUX

La partie prenante la plus importante dans cette consultation réglementaire est le fermier. La conservation de semences et d’autres matériels de multiplication pour produire de futures cultures est fondamentale pour l’agriculture. Les fermières et fermiers ont besoin de semences pour produire leurs cultures et nourrir leur bétail – c’est la clé de leur subsistance. Les fermières et les fermiers, y compris les autochtones, sont les premiers sélectionneurs de plantes et c’est grâce à eux que nous disposons aujourd’hui de la biodiversité agricole et de la génétique qui sont à la base de notre système moderne de sélection des plantes. Aucune des nouvelles variétés n’existerait sans les connaissances des générations de fermières en matière de plantes, d’agronomie et de conservation des semences. Au cours du siècle dernier, les fermières ont participé aux travaux publics de sélection végétale par divers moyens, notamment en finançant des commissions des cultures gérées par les agriculteurs, qui allouent des ressources à des projets de sélection végétale répondant à nos priorités agricoles. Nous apprécions la sélection végétale elle-même pour sa capacité à développer de nouvelles variétés qui répondent à des conditions changeantes et à de nouveaux défis. Nous nous opposons à ce que la pratique ancestrale des fermières en matière de conservation des semences ne soit plus un droit mais un « privilège des fermiers » qui peut être supprimé d’un trait de plume, et à ce que ce pouvoir soit utilisé pour créer une dépendance à l’égard de sociétés semencières privées, souvent étrangères.

SECTION RÉSUMÉ EXÉCUTIF

Le règlement proposé est conçu pour accroître la monopolisation des nouvelles variétés de cultures horticoles et des variétés hybrides, ce qui profite aux parties prenantes qui détiennent des droits d’obtenteur. Les intérêts de ces parties prenantes sont servis, alors que l’impact sur les intérêts des fermières n’est pas pris en compte. L’approche unilatérale de la réglementation des droits d’obtenteur est inappropriée pour un régulateur public.

Le document de consultation prétend que la suppression du privilège des fermières sur les variétés horticoles encouragera l’investissement et l’innovation, mais ce n’est qu’une hypothèse. Le monopole du droit d’obtenteur sur la vente des variétés protégées permet aux sélectionneurs d’accroître leurs revenus en augmentant les ventes annuelles et la perception des redevances, mais rien ne les oblige à utiliser cet argent pour la sélection végétale au Canada ou ailleurs.

Le renforcement de la protection des droits d’obtenteur en interdisant la conservation des semences et en augmentant la période de protection peut en fait entraîner une diminution des investissements dans les nouvelles variétés, car les entreprises n’auront pas besoin de mettre de nouveaux produits sur le marché aussi rapidement pour maintenir ou augmenter leur flux de revenus.

Nous avons également constaté que le renforcement des régimes de droits d’obtenteur va de pair avec une consolidation croissante du secteur des semences et une diminution de la concurrence. Le système mondial des semences est désormais dominé par quatre multinationales – Bayer, BASF, Corteva et Sinochem – à la suite de fusions et d’acquisitions. Elles pourraient utiliser l’argent gagné grâce à la modification réglementaire proposée pour consolider davantage leurs avoirs au Canada et à l’étranger, ce qui réduirait encore la concurrence dans le secteur des semences, au lieu de l’investir dans la sélection végétale.

La comparaison de l’efficacité de la sélection végétale publique du blé (où la conservation des semences est courante) et de la sélection privée du colza génétiquement modifié (où la conservation des semences est interdite) montre que les sélectionneurs de colza consacrent une part plus faible de leurs revenus à la poursuite de la sélection, car ils allouent des sommes importantes à la publicité et aux dividendes versés aux actionnaires. En raison du monopole des sélectionneurs de canola basé sur les brevets, les prix des semences de canola sont exponentiellement plus élevés (1 000 $/boisseau) que le prix payé aux fermiers pour le canola qu’ils produisent et vendent au silo (13 $/boisseau).

Faire payer plus cher les semences aux fermières augmentera la rentabilité des sélectionneurs privés, mais ne se traduira pas nécessairement par une augmentation de la sélection, ni par une sélection au Canada pour les conditions de culture canadiennes.

Les redevances et les ventes de nouvelles variétés ont lieu une fois le processus de sélection terminé. Cet argent n’est pas utilisé pour financer le développement des variétés dès le départ. Les bénéfices passés peuvent être investis dans de nouvelles sélections, mais les décisions concernant les prochaines sélections seraient basées en partie, ou entièrement, sur leur rentabilité anticipée. Cela encouragerait la sélection pour les grands marchés, les cultures populaires et, pour les entreprises de semences et de produits agrochimiques intégrées verticalement, l’augmentation des ventes d’intrants tels que les engrais, les fongicides et les herbicides.

La suppression du privilège des fermiers pour les cultures hybrides encouragera le recours à l’hybridation pour la sélection de types de cultures non horticoles afin de s’approprier les avantages monopolistiques des ventes annuelles de semences et de la perception de redevances sur les céréales, les légumineuses et les oléagineux, où la conservation des semences est une pratique très répandue.

La suppression du privilège des fermières n’incitera pas les sélectionneurs à mettre au point des variétés adaptées aux défis spécifiques des conditions canadiennes, mais elle leur offrira de nouvelles possibilités d’accroître considérablement leurs profits.

La plupart des semences de légumes du Canada sont importées d’Europe ou des États-Unis, et la plupart des demandes de droits d’obtenteur pour les cultures horticoles émanent d’obtenteurs étrangers. Actuellement, rien n’empêche les obtenteurs étrangers de pénétrer sur le marché canadien des variétés de fruits, de légumes et de plantes ornementales.

Comme l’indique l’ACIA, « sur les 400 demandes reçues chaque année, environ 85 % (342 demandes) proviennent de demandeurs internationaux, tandis que 15 % (58 demandes) émanent de parties prenantes canadiennes. Sur ces 58 demandes, 31 % (18 demandes) proviennent d’entités publiques canadiennes (telles que des universités) et 69 % (40 demandes) d’entreprises privées ».

De toute évidence, il est très facile et peu coûteux pour les obtenteurs étrangers d’obtenir la protection du droit d’obtenteur pour leurs variétés – la cotisation annuelle est inférieure à 125 dollars canadiens. Il n’est pas nécessaire que leurs variétés soient agronomiquement performantes ou utiles au Canada. Le marché canadien de l’horticulture est petit, compte tenu de notre population d’un peu plus de 40 millions d’habitants, de notre courte période de végétation et de la faible superficie des terres adaptées à ces cultures (334 000 acres pour les fruits, 238 000 acres pour les légumes et 394 000 acres pour les pommes de terre en 2024), soit moins de 5 % de la superficie de production de légumes de l’Europe et des États-Unis à eux seuls. Les sélectionneurs étrangers auraient besoin de revenus beaucoup plus élevés que ceux que pourrait générer une augmentation progressive des ventes annuelles de semences pour les variétés horticoles sur notre marché (sachant que la plupart des producteurs achètent déjà des semences chaque année), de sorte que les sélectionneurs sont plus susceptibles de considérer le Canada comme un marché résiduel pour leurs variétés existantes. Tout l’argent qu’ils peuvent gagner en vendant au Canada est un « bonus ».

L’augmentation proposée de la période de protection des droits d’obtenteur pour les pommes de terre, les asperges et les cultures non arboricoles (c’est-à-dire les baies) de 20 à 25 ans n’est pas nécessaire et va à l’encontre de l’intérêt public. Les sélectionneurs internationaux dominent l’enregistrement des droits d’obtenteur pour ces types de cultures (85 % des nouvelles demandes de droits d’obtenteur pour les pommes de terre proviennent d’autres pays), ce qui indique que notre environnement actuel en matière de droits d’obtenteur n’est pas un obstacle pour eux. Le Canada dispose également d’un programme public de sélection de pommes de terre performant à la station de recherche de Fredericton, l’un des rares programmes de développement de variétés d’AAC encore en place. La période de protection n’a pas entravé le développement des variétés dans cette station.

L’ACIA justifie la prolongation de la période de protection en affirmant que la biologie de ces cultures est moins compatible avec le désir des obtenteurs de récupérer les paiements de redevances destinés à couvrir les coûts de développement de nouvelles variétés que dans le cas des grandes cultures annuelles. Au lieu d’essayer de compenser leurs taux de multiplication plus faibles et leur maturation plus lente en extorquant aux fermières de nombreuses années supplémentaires de paiement de redevances (et en supprimant le privilège des fermiers qui empêche l’utilisation de matériel de multiplication conservé à la ferme), l’ACIA et AAC devraient promouvoir des politiques visant à soutenir un financement fiable et à long terme de la sélection publique de ces cultures.

La prolongation de la période de protection de ces cultures ne ferait qu’empêcher des éléments génétiques précieux d’entrer dans le domaine public pendant une période plus longue (ou de ne pas y entrer du tout, si l’obtenteur cesse de commercialiser la variété protégée par le droit d’obtenteur avant la fin de la période de protection) et, ce faisant, limiterait ou empêcherait ces variétés d’être plus largement distribuées aux cultivateurs dans tout le pays.

En ce qui concerne les variétés non horticoles, le Canada dispose d’un système de sélection végétale publique beaucoup plus solide, financé principalement par le gouvernement du Canada, les cotisations des fermiers perçues par les commissions des cultures et les fonds de la Western Grains Research Foundation. Les variétés développées grâce à la sélection végétale publique sont populaires et très appréciées des fermières. Le financement public et la prise de décision démocratique garantissent que les résultats ont des retombées plus larges pour le public, alors qu’un monopole fondé sur la protection des obtentions végétales et des incitations à restreindre la conservation des semences donneraient la priorité aux avantages privés, comme nous l’avons vu avec les cultures OGM où la tolérance aux herbicides (qui entraîne une augmentation des ventes d’herbicides par les mêmes entreprises) est recherchée, tandis que les avantages agronomiques tels que la tolérance à la sécheresse et la résistance aux maladies sont négligés.

Cette analyse d’impact réglementaire n’a pas pris en compte l’impact sur la partie prenante la plus importante du système agricole canadien : le fermier. Elle n’a pas non plus fourni de données adéquates pour étayer ses affirmations et n’a pas pris en compte les conséquences négatives de la restriction de l’accès des fermiers aux nouvelles variétés à multiplier dans leurs propres exploitations, ni les conséquences négatives de l’octroi aux obtenteurs d’un contrôle total sur l’accès des fermiers à l’achat de ces variétés, ni le risque que des variétés protégées soient purement et simplement retirées du marché afin d’éviter qu’elles ne tombent dans le domaine public.

Un régime de droits d’obtenteur plus restrictif ne peut pas surmonter les réalités de la petite population du Canada et des conditions de croissance difficiles sur notre vaste territoire. Le fait de dépendre d’une approche de la sélection entièrement axée sur le marché fera du Canada un marché résiduel pour les cultures horticoles, quel que soit le degré de contrôle de l’accès des fermières au matériel de multiplication, et entraînera une hausse des prix des cultures non horticoles si l’on encourage les variétés hybrides protégées par le droit d’obtenteur et ne permettant pas de conserver les semences. Investir dans la sélection végétale publique serait plus stratégique pour l’économie agricole et la sécurité alimentaire du Canada.

SECTION DES QUESTIONS

La législation et la réglementation canadiennes actuelles en matière de protection des obtentions végétales sont conformes à l’UPOV 91. Les modifications proposées iraient au-delà des exigences de l’UPOV 91, renforçant les droits des obtenteurs aux dépens des fermières, tant sur le plan financier qu’en ce qui concerne la portée de leurs pratiques agricoles.

Les amendements proposés rendraient les semences et autres matériels de multiplication moins accessibles aux fermières et/ou augmenteraient leurs coûts en exigeant le paiement de redevances annuelles, pendant davantage d’années. Les amendements proposés augmenteraient également la capacité des entreprises de sélection végétale à monopoliser le matériel génétique en empêchant les fermières de le reproduire pour leur propre usage sur leurs propres exploitations.

  • Le champ d’application de l’exemption du privilège des fermiers est trop large

La suppression du privilège des agriculteurs pour les variétés protégées de fruits, de légumes, de plantes ornementales et d’hybrides constitue une atteinte inacceptable à la pratique ancestrale des fermières consistant à conserver et à utiliser les semences de ferme pour planter leurs cultures au cours des saisons suivantes.

La possibilité d’utiliser des semences de ferme, des boutures, des greffons, des greffes, etc., pour continuer à cultiver des variétés de fruits, de légumes, de plantes ornementales et hybrides protégées par le droit d’obtenteur sur leur propre exploitation, après avoir payé la redevance requise sur l’achat initial, permet aux fermières d’adapter les variétés à leurs conditions de culture et à leurs climats spécifiques. Le privilège des fermiers permet également aux agriculteurs de réduire leurs coûts de production en utilisant des semences et d’autres matériels de multiplication conservés à la ferme.

Les fermières ne conservent généralement pas les semences des cultures hybrides car elles savent que les générations suivantes ne produisent pas des résultats constants. Les fermières ne produisent pas d’hybrides à la ferme en utilisant les « selfs » qui peuvent être présents par inadvertance dans les cultures hybrides produites à partir de semences achetées. La production de semences hybrides nécessite beaucoup de travail et des techniques spéciales, et il faudrait que les deux lignées parentales soient acquises par accident pour que cela soit possible.

La proposition de suppression du privilège des agriculteurs sur les hybrides permet aux semenciers d’interférer avec les pratiques de conservation des semences largement répandues chez les fermières de céréales, d’oléagineux et de légumineuses. Elle encouragerait les sélectionneurs à développer des variétés hybrides et à désenregistrer les variétés non hybrides dans le cadre de la loi sur les semences, les excluant ainsi de la sphère commerciale.

Même si elle est rarement utilisée, ou si elle ne l’est que par quelques fermières, la fermeture de la porte à l’utilisation de semences de ferme et d’autres matériels de multiplication restreint la liberté des fermières et affaiblit leur autonomie. La pratique consistant à conserver des semences et/ou du matériel de multiplication pour les cultures futures est une pratique courante dans la production horticole au Canada, même si une majorité de fermières utilisent des semences, des plantes ou du matériel de multiplication achetés.

La conservation des semences est essentielle non seulement pour que les fermiers aient un accès sûr à leur intrant le plus important, mais aussi parce que cette pratique permet.. :

  • la résilience climatique de l’exploitation grâce à l’adaptation des variétés à des environnements et à des pratiques agricoles spécifiques ;
  • le remplacement des plants de baies et d’arbres fruitiers pérennes ligneux perdus (en raison de la faune et/ou d’un froid excessif, de la sécheresse, des inondations) par la même variété lorsqu’elle n’est pas disponible dans le commerce ;
  • l’accès au matériel de multiplication en cas de graves perturbations de la chaîne d’approvisionnement, un risque important pour les semences de légumes qui sont principalement importées ;
  • réduction des coûts d’ensemencement et de multiplication (bien que le coût ne soit pas nul, car la conservation des semences nécessite du temps, des compétences et des installations de stockage) ;
  • la discipline des prix imposée aux vendeurs de semences – les hausses de prix seront limitées lorsque les fermières pourront passer aux semences de ferme si le prix d’achat augmente trop ;
  • la possibilité de continuer à utiliser une variété si l’obtenteur décide de la retirer du marché avant la fin de la période de protection du droit d’obtenteur.

L’élimination du privilège des fermières pour les variétés de fruits, de légumes, de plantes ornementales et d’hybrides transférerait trop de contrôle sur le secteur agricole canadien à un secteur mondial des semences de plus en plus privatisé et concentré.

  • La durée de la protection des droits d’obtenteur pour les pommes de terre, les asperges et les plantes ligneuses est trop courte.

L’ACIA n’a pas démontré comment la prolongation de la période de protection des pommes de terre, des asperges et des plantes ligneuses encouragerait une plus grande sélection nationale ou un meilleur accès aux variétés internationales. Le Canada attire manifestement un nombre équivalent de nouvelles variétés que les pays ayant une population plus importante et des régimes de DPI plus restrictifs, et les sélectionneurs canadiens sont en mesure de fournir des variétés que nous avons développées nous-mêmes dans le cadre d’efforts publics de sélection végétale. La sélection végétale financée par les pouvoirs publics dans et pour les conditions canadiennes est un investissement public stratégique qui se traduit par un développement réussi des variétés.

Les demandeurs étrangers de droits d’obtenteur n’obtiendront pas suffisamment de revenus des ventes canadiennes, même avec une prolongation de 5 ans de la durée de protection, pour justifier un élevage spécifique pour notre marché. Ainsi, la prolongation de 5 ans n’est qu’un moyen pour les éleveurs étrangers d’augmenter leurs revenus en vendant sur le marché canadien. Il est peu probable que les redevances qu’ils obtiendraient ainsi soient investies au Canada.

Au lieu d’essayer de compenser leurs taux de multiplication plus faibles et leur maturation plus lente en extorquant aux fermières de nombreuses années supplémentaires de paiement de redevances et en supprimant le privilège des fermiers pour empêcher l’utilisation de matériel de multiplication conservé à la ferme, l’ACIA et AAC devraient promouvoir des politiques visant à soutenir un financement fiable et à long terme pour la sélection publique de ces cultures.

  • Les exigences actuelles en matière de dépôt peuvent décourager les demandes de droits d’obtenteur.

Les exigences actuelles en matière de dépôt ne sont pas onéreuses. La taxe et les tâches administratives requises pour obtenir la protection du droit d’obtenteur sont minimes par rapport à la valeur que les éleveurs obtiennent en tant que titulaires du droit d’obtenteur au Canada.

Les demandeurs ne devraient pas être autorisés à demander des droits sans fournir simultanément un échantillon représentatif de matériel de multiplication, en particulier si la définition de « nouveau » est modifiée pour exclure la publicité avant la vente physique de la variété. La valeur de l’obtention des droits est considérable – les demandeurs doivent être désireux et capables de satisfaire à cette exigence.

FICHE D’INFORMATION

  • Autorité législative et autorités réglementaires

La loi canadienne sur la protection des obtentions végétales et son règlement d’application sont actuellement conformes à l’UPOV 91. Les pays sont libres de prendre leurs propres décisions concernant le privilège des fermiers. En 2014, lorsque le projet de loi visant à modifier la loi pour la rendre conforme à l’UPOV 91 a été présenté au Parlement, la question du privilège des fermiers a été vigoureusement débattue. Le public a fortement soutenu le droit des fermières à conserver des semences et a demandé que la clause relative au privilège des fermières soit renforcée. L’UNF et d’autres organisations agricoles ont présenté leur position devant les commissions parlementaires, et au moins 87 pétitions signées à la main par des dizaines de milliers de Canadiens de tout le pays ont été déposées et/ou présentées à la Chambre des communes par leurs députés. La pétition stipulait ce qui suit :

Nous, soussignés, citoyens du Canada, reconnaissons les droits inhérents des fermières, issus de milliers d’années de coutumes et de traditions, de conserver, réutiliser, sélectionner, échanger et vendre des semences. Les restrictions actuelles et nouvellement proposées aux pratiques traditionnelles des fermières – résultant de contrats commerciaux, de systèmes de préservation de l’identité (PI) et/ou de la législation – criminalisent ces pratiques ancestrales et nuisent aux fermières, aux citoyens et à la société en général.

Par conséquent, vos pétitionnaires demandent au Parlement de s’abstenir d’apporter à la Loi sur les semences ou à la Loi sur la protection des obtentions végétales, par le biais du projet de loi C-18, Loi modifiant certaines lois en matière d’agriculture et d’agroalimentaire, des modifications qui auraient pour effet de restreindre davantage les droits des fermières ou d’augmenter les coûts pour ces dernières. En outre, nous demandons au Parlement d’inscrire dans la loi les droits inaliénables des fermières et des autres Canadiennes et Canadiens de conserver, réutiliser, sélectionner, échanger et vendre des semences.

Cette pression a conduit à modifier le projet de loi en ajoutant le « stockage » (c’est-à-dire l’entreposage des semences) à la clause du privilège des fermiers. C’était la volonté du Parlement d’inclure une clause de privilège des fermières forte, et elle ne devrait pas être diminuée par une réglementation maintenant.

  • Contexte international

L’ACIA ne fournit aucune preuve à l’appui de son affirmation selon laquelle « les sélectionneurs internationaux sont réticents, et parfois même refusent, d’introduire leurs variétés nouvelles et améliorées dans les juridictions qui accordent un privilège illimité aux agriculteurs pour les types de cultures horticoles et ornementales ». Les statistiques de l’UPOV montrent que le nombre de demandes de droits d’obtenteur déposées par des obtenteurs étrangers au Canada est plus élevé que dans de nombreux pays qui ont des règles plus restrictives en matière de privilège des agriculteurs. De 2000 à 2022, le Canada s’est classé au 7e rang des pays de l’UPOV pour les titres de droits d’obtenteur reçus de non-résidents et délivrés à ces derniers. Le Canada s’est également classé parmi les 10 premiers pays de l’UPOV recevant des demandes de non-résidents en 2012, alors que la loi canadienne sur les droits d’obtenteur était fondée sur l’UPOV 78, dont la période de protection est plus courte que celle de l’UPOV 91. Cela suggère que la portée du privilège des fermières du Canada n’est pas un obstacle pour les sélectionneurs étrangers.

SECTION DES OBJECTIFS

L’objectif déclaré de « renforcer la protection des obtenteurs et de faciliter l’accès au cadre de la propriété intellectuelle des droits d’obtenteur » favorise les intérêts des obtenteurs. Les obtenteurs privés internationaux n’ont pas besoin d’être protégés : ils font partie des entreprises les plus grandes et les plus puissantes du monde. Le cadre réglementaire du Canada devrait contrer, et non intensifier, les déséquilibres de pouvoir entre les résidents canadiens ordinaires, comme les fermières individuelles, et les puissantes sociétés multinationales.

SECTION DESCRIPTION

  • Actualiser les exigences de dépôt pour encourager les demandes de droits d’obtenteur

Les demandeurs ne doivent pas introduire de demande avant d’être en mesure de fournir un échantillon représentatif de matériel de multiplication. Si cet échantillon n’existe pas encore, leur demande est prématurée. La demande et l’octroi de droits avant que l’ACIA n’ait reçu un échantillon introduisent un risque de fraude et/ou affaiblissent la surveillance. Les coûts supportés par les demandeurs sont très faibles pour obtenir le monopole d’une variété de semence pendant 20 à 25 ans. Il est raisonnable de s’attendre à ce qu’ils soumettent un échantillon avec leur demande.

SECTION DÉVELOPPEMENT RÉGLEMENTAIRE

Consultation préalable à la réglementation

La consultation préréglementaire était prévue du 29 mai au 12 juillet 2024, ce qui ne laissait que 45 jours pendant la saison de plantation chargée pour les fermières, les horticulteurs et les arboriculteurs. Malgré cet obstacle, l’UNF ainsi que 9 autres organisations agricoles ont préparé et soumis des commentaires détaillés. Cependant, le rapport « What We Heard » publié ultérieurement n’a pas reflété correctement notre contribution. L’ACIA et le Bureau des droits d’obtenteur ont le devoir d’être transparents, impartiaux et responsables devant les Canadiens. Nous avons demandé qu’une révision visant à corriger les erreurs et les omissions soit publiée au moins 100 jours avant le début du processus de publication dans la Gazette, mais cela n’a pas été le cas.

Notre soumission était une réponse conjointe de dix organisations agricoles à travers le pays représentant les intérêts des fermiers biologiques et conventionnels et des producteurs de semences cultivant pour les marchés nationaux et internationaux, et deux organisations non gouvernementales soutenant la recherche agricole et l’éducation dans l’agriculture biologique et résiliente au climat. Dans le rapport, notre réponse a été présentée de manière erronée comme celle d’un groupe de producteurs biologiques et d’une organisation agricole.

Toutes les préoccupations que nous avons soulevées sur la façon dont l’amendement proposé limiterait la capacité des fermières à s’adapter au changement climatique en perdant l’accès à certaines variétés, ou en étant incapables d’adapter certaines variétés à leurs exploitations, ont été omises dans le document. La capacité d’adapter certaines variétés à la ferme est une stratégie d’adaptation au changement climatique essentielle, en particulier pour les fermières qui vivent dans des climats marginaux ou dans des régions fortement touchées par le changement climatique. Le fait d’exiger de ces fermières qu’elles paient des redevances sur des variétés qui sont essentielles à leurs activités agricoles, mais qui nécessitent également une adaptation plus poussée, empêche les fermières d’adapter les variétés par le biais de semences conservées à la ferme afin d’atténuer les effets du changement climatique.

L’ACIA ne cesse de répéter que ces modifications réglementaires permettront au Canada de mieux s’aligner sur des juridictions similaires telles que les États-Unis et l’Union européenne. Cependant, le système américain de protection des obtentions végétales n’empêche pas les fermières de conserver les semences et autres matériels de multiplication des variétés protégées pour une utilisation à la ferme, et l’Union européenne prévoit une exemption pour les petites exploitations agricoles. Ces déclarations donnent l’impression que le Canada ne suit pas le rythme des juridictions similaires, alors que nous sommes en fait alignés sur notre principal partenaire commercial, les États-Unis.

Le rapport de l’ACIA suggère que l’accès aux variétés non protégées compense la restriction de l’accès aux variétés protégées. Le rapport affirme à plusieurs reprises que les fermières auront accès aux variétés non protégées sur le marché en réponse aux préoccupations que nous avons soulevées. Ces déclarations rejettent l’argument principal de notre lettre : Les fermiers comprennent qu’ils ont accès à des variétés non protégées sur le marché ; cependant, ils craignent de ne pas pouvoir conserver du matériel de multiplication pour l’utilisation à la ferme de certaines variétés protégées qui offrent une génétique qui n’est pas disponible par le biais de variétés non protégées sur le marché.

La réponse de l’ACIA selon laquelle les variétés protégées par le droit d’obtenteur peuvent être utilisées pour la sélection passe à côté de la question et est trompeuse. En supprimant le privilège des fermiers, il deviendrait illégal pour les fermiers de planter des semences hybrides protégées par le droit d’obtenteur conservées à la ferme afin de développer un cultivar adapté localement pour leur propre usage, ce qui remettrait en cause les exemptions qui sont censées ne pas être affectées. La mention des exemptions pour les utilisations non commerciales et les utilisations à des fins de recherche est un leurre : Si un obtenteur utilise des semences hybrides protégées par le droit d’obtenteur comme matériel d’origine, toute variété qui en résulterait serait très probablement couverte par le droit d’obtenteur du propriétaire du matériel d’origine en raison de la clause « Essentiellement dérivé » de la loi. La nouvelle variété serait donc soumise au paiement de redevances et l’utilisation de semences de ferme serait interdite. Il est également trompeur pour l’ACIA d’omettre le mécanisme « Essentiellement dérivé » dans sa réponse.

Nous nous opposons à l’extension du champ d’application de la protection des obtentions végétales en supprimant le privilège des fermières et/ou en prolongeant la période de protection des droits d’obtenteur pour certaines cultures, parce que quiconque contrôle l’accès aux semences a un grand pouvoir sur nos fermes, notre approvisionnement alimentaire et, en fin de compte, sur notre population. Il s’agit d’une perte de droits réelle, et non « perçue », et le rapport suggère que les fermières devraient se satisfaire de la perte de leurs droits de conservation des semences en raison de leur accès continu aux semences qui sont déjà dans le domaine public.

ANALYSE RÉGLEMENTAIRE

  • Avantages et coûts

Il n’existe pas de données sur la quantité de revenus supplémentaires pour les sélectionneurs qui résulteraient de l’élimination du privilège des fermiers sur les cultures horticoles. Nous sommes conscients qu’une majorité de fermières horticoles achètent des semences et/ou des plants chaque année, et qu’il s’agit d’un secteur relativement petit dans l’agriculture canadienne (25 145 fermes selon le Recensement de l’agriculture 2021). Pour ceux qui utilisent le privilège des fermiers, combien passeraient des variétés protégées par le droit d’obtenteur aux variétés du domaine public, et combien passeraient à des achats annuels ? Quelle serait l’augmentation globale des revenus des obtenteurs qui en résulterait ? Et quelle est la comparaison avec le coût total de la sélection ? Ces données devraient être fournies afin que les affirmations de l’ACIA puissent être évaluées. Si les revenus supplémentaires sont faibles et ne suffisent pas à financer l’élevage, existe-t-il une autre justification qui n’a pas été mentionnée ?

  • L’objectif des petites entreprises

Le calcul de l’objectif des petites entreprises est basé sur l’impact de 56 petites entreprises, et l’impact évalué est la réduction du coût des frais payés à l’ACIA pour le traitement des demandes de droits d’obtenteur, qui devrait s’élever à seulement 22 dollars par an. Un examen du Plant Varieties Journal de juillet 2025, qui énumère les demandes canadiennes de droits d’obtenteur, ne mentionne qu’une seule petite entreprise canadienne – Vineland, qui bénéficie de financements publics et privés et dispose d’un budget de 12 millions de dollars – tous les autres demandeurs étant des sociétés étrangères ou leurs filiales canadiennes, AAC ou des universités. La section « Small Business lens » ne précise pas quels types d’entreprises sont pris en considération dans le cadre de cette optique.

Le Canada compte environ 190 000 exploitations agricoles, presque toutes considérées comme des petites entreprises. Parmi elles, un peu plus de 25 000 cultivent des produits horticoles. L’augmentation des coûts due à la suppression du privilège des fermières pour les cultures de fruits, de légumes, de plantes ornementales et hybrides n’a fait l’objet d’aucune projection ni d’aucune information.

  • Impacts sur la sécurité alimentaire et le coût des denrées alimentaires

Comme indiqué précédemment, les régimes de droits d’obtenteur plus stricts sont associés à la consolidation. À mesure que les grandes entreprises acquièrent un plus grand contrôle sur les semences, elles sont en mesure d’acquérir des entreprises plus petites et d’étendre leur part de marché. Cette concentration accrue renforce le pouvoir monopolistique dans le système alimentaire, ce qui entraîne une hausse des prix pour les fermières et les consommateurs. L’augmentation des coûts pour les fermières rend le système alimentaire moins résistant et contribue à l’augmentation des prix des produits alimentaires. Le Canada dépend des importations pour la majorité de ses fruits et légumes. Le changement climatique, les fluctuations monétaires et les bouleversements politiques rendent précaire notre approvisionnement en denrées alimentaires importées. Une modification réglementaire qui réduit la conservation des semences et augmente les coûts d’exploitation des fermes rendra plus difficile la survie des fermières horticoles canadiennes, ce qui augmentera notre dépendance à l’égard des aliments importés.

TEXTE RÉGLEMENTAIRE PROPOSÉ SECTION

Cette proposition de réglementation doit être abandonnée.