Sauvez les semences !
Une nouvelle initiative passionnante est en train de voir le jour dans tout le Canada ! Il s’agit de l’initiative de la famille Bauta sur la sécurité des semences au Canada. Dans tout le Canada, des coordinateurs régionaux des semences aident les fermières à accroître leur sécurité en matière de semences grâce à des projets sur le terrain, à des essais et à des possibilités de financement. Pour savoir qui est votre coordinateur régional pour les semences, cliquez ici.
Le coordinateur régional des semences pour le Canada atlantique est Steph Hughes. J’ai pensé qu’il serait amusant d’interviewer Steph pour en savoir plus sur l’initiative Bauta.
Voici ce qu’il en est :
Steph, qu’est-ce que l’initiative de la famille Bauta sur la sécurité des semences et qui en est à l’origine ? Quand ? Et pourquoi ?
Cette initiative est un programme national. Son objectif est d’aider les fermières (et d’autres personnes) à accroître la qualité, la quantité et la diversité des semences produites de manière écologique et adaptées aux régions du Canada. Il a été lancé en février 2013, après une « année pilote » de recherche et de consultation menée par USC Canada. Nous travaillons dans cinq grands domaines : (1) le soutien aux fermiers, qui comprend la formation, le développement des marchés et les possibilités de financement ; (2) la recherche appliquée, qui comprend notre grand projet de sélection végétale participative ; (3) l’accès public aux semences, qui comprend le travail et le financement pour soutenir les bibliothèques de semences émergentes ; (4) un service de semences en ligne; et (5) la création d’un mouvement, qui est le travail fondamental pour s’assurer que tout ce que nous faisons a une force durable. En ancrant notre travail à la base et en le réalisant grâce à des partenariats significatifs, il devient la propriété de la communauté et est durable à long terme.
Le programme est généreusement financé par la Fondation W. Garfield Weston et dirigé au niveau national par USC Canada et Semences de la diversité Canada, des organisations qui ont des décennies d’expérience dans le travail avec les semences et le soutien aux communautés qui construisent la sécurité des semences. Au niveau régional, le programme est « hébergé » par différentes organisations. Dans le Canada atlantique, il s’agit d’ACORN. Cette structure permet au programme de s’adapter et de répondre aux besoins de la communauté, tout en poursuivant les mêmes objectifs nationaux.
Qu’est-ce qui vous a amené à vous intéresser personnellement à la question des semences ?
Depuis longtemps, je considère l’alimentation et la souveraineté alimentaire comme une question de justice sociale. Pour moi, c’est le moyen le plus important de prendre en compte et d’aborder la pauvreté, la résilience des communautés, le changement climatique, le bien-être… parce que nous mangeons tous. Ainsi, réfléchir à l’origine de cette nourriture, à ce qu’elle contient, à qui l’a cultivée, à son coût, aux raisons pour lesquelles j’y ai accès et d’autres non… est une sorte de porte d’entrée vers la compréhension de questions beaucoup plus vastes concernant l’économie, l’environnement et nos interactions sociales et politiques (tant au niveau des ménages qu’à l’échelle internationale). Pour moi, la nourriture est un symbole facile de sécurité, d’indépendance et de pouvoir.
Ce n’est qu’en participant à ce programme que j’ai vraiment commencé à faire le lien avec les semences. D’une certaine manière, je suis gênée de dire cela parce que c’est tellement évident une fois qu’on y est. Mais je pense que beaucoup de gens dans le mouvement alimentaire sont dans le même bateau. Notre nourriture provient de semences – presque toutes – et si les semences viennent de l’autre bout du monde, d’un climat complètement différent du nôtre, expédiées ici par la même infrastructure mondiale fragile qui est si vivement critiquée dans le mouvement « tout local », où cela nous mène-t-il ? Quelles sont nos principales vulnérabilités ? Que pouvons-nous faire pour y remédier ?
Les semences ramènent en quelque sorte le mouvement alimentaire à la maison ; elles bouclent la boucle.
La prise de conscience de certaines des menaces qui pèsent sur notre « paysage de semences » est indéniable. On le voit dans les médias sociaux, et un peu partout en fait, une fois que l’on sait ce que l’on cherche. Et il existe différentes manières de faire face à ces menaces. Ce que j’aime vraiment dans ce programme, c’est qu’il met l’accent sur l’aide à apporter aux communautés pour qu’elles conçoivent et financent les solutions qui leur conviennent. En reliant ces communautés et en diffusant leur travail, nous contribuons à apporter une réponse significative à ces menaces. Les choses ne seront pas les mêmes partout, et c’est un signe de réussite. C’est une force – une diversité – qui mérite d’être cultivée.
Quels sont les projets qui ont vu le jour dans le Canada atlantique depuis que vous avez commencé à travailler avec Bauta ?
Jusqu’à présent, les Canadiens de l’Atlantique ont fait preuve d’un enthousiasme très stimulant à l’égard de ce travail. Il y a un réel appétit pour la formation en matière de semences dans toute la région. Jusqu’à présent, nous avons organisé plusieurs ateliers intermédiaires sur les semences à l’intention des fermiers et des maraîchers qui souhaitent améliorer leur jeu en matière de semences, c’est-à-dire intégrer les semences dans leur exploitation. Nous avons organisé un certain nombre de journées sur le terrain – localement pour présenter nos experts régionaux – et nous sommes allés à Fedco Seedhouse dans le Maine. Tout cela s’est fait dans le cadre de ce programme.
Nous avons également soutenu sept projets indépendants par l’intermédiaire du Fonds de facilitation des semences. Il s’agit d’un soutien financier aux producteurs de semences, c’est-à-dire aux propriétaires de petites entreprises de semences, afin de diversifier et d’intensifier leurs activités dans le domaine des semences. Je suis donc impatient de voir comment ces projets vont évoluer. Nous avons également assisté à l’émergence d’un grand nombre de projets de bibliothèques de semences. Avec le soutien de Seeds of Diversity Canada, nous diffusons des manuels de bonnes pratiques et faisons de notre mieux pour relier les différents projets afin qu’ils puissent apprendre les uns des autres. Nous avons également eu l’occasion de financer trois de ces projets dans la région atlantique – un à Terre-Neuve, un en Nouvelle-Écosse et un à l’Île-du-Prince-Édouard. Je pense que nous avons également beaucoup travaillé à la mise en place d’un réseau cette année. J’ai fait beaucoup d’efforts pour trouver des gens, me présenter et présenter le programme, leur parler de ce qu’ils font et de ce qui serait utile. Les gens ont été très généreux de leur temps.
Quels sont les projets à venir ?
Cette année est vraiment passionnante ! Nous avons quelques projets de terrain très intéressants qui se déroulent cette année. L’un d’eux est un essai de production de semences dans le cadre duquel les fermières travaillent avec des variétés de légumes et de grandes cultures pour déterminer s’il s’agit de semences viables dans leur région. Tout au long de la saison, ils enregistrent des observations qui seront ensuite disponibles via notre service de semences en ligne et, à la fin de la saison, ils enverront un échantillon de semences à la bibliothèque Seeds of Diversity de l’Ontario. Cela accroît notre capacité à travailler avec des cultures de semences, ainsi que les données disponibles et l’accès à la culture par le biais de la banque de semences.
Un autre projet est notre projet de sélection végétale participative, qui a été lancé dans d’autres régions l’année dernière. Cette année, nous travaillons avec quelques producteurs des Maritimes pour explorer de nouvelles variétés canadiennes créées à partir des commentaires des fermières de l’année dernière. Nous soutenons également un essai de variétés d’avoine à grains nus, d’orge à grains nus et de quinoa dans le comté d’Albert, au Nouveau-Brunswick. Nous proposerons bien sûr des journées sur le terrain et d’autres occasions d’entendre toutes les personnes engagées dans ce travail une fois que ces projets seront sur (ou dans) le terrain !
C’est également une année idéale pour la formation et la mise en réseau. Nous avons à la fois la conférence ACORN (avec un symposium sur les semences et les races héréditaires) et la conférence semestrielle organisée par les producteurs de semences biologiques de l’Est du Canada (Eastern Canada Organic Seed Growers – ECOSGN). Les occasions d’apprendre ne manqueront donc pas !
Que se passe-t-il au Canada ?
Dans tout le pays, l’activité est tout aussi intense et impressionnante. Cette année, nous avons lancé une série de webinaires sur les semences qui s’est avérée très populaire (allez sur seedsecurity.ca pour plus de détails !). Des stagiaires en semences sont actuellement recrutés et embauchés dans tout le pays afin de soutenir les nouveaux venus dans le mouvement des semences. En Colombie-Britannique, un projet de semences de carottes entre dans sa deuxième année(http://www.bcseeds.org). Les Prairies se préparent à une grande conférence sur les matières organiques qui se tiendra cet automne(http://www.organicconnections.ca) et l’est du Canada (y compris la région atlantique) envisage de lancer un projet de recherche à la ferme sur des variétés d’épinards et de choux chinois à pollinisation libre. Ce n’est qu’un avant-goût ! Rendez-vous sur le site www.seedsecurity.ca pour savoir qui accueille le programme à travers le Canada et ce qu’ils font !
Quelle est la partie de votre travail que vous préférez ?
Je pense que dans tout travail, ce sont les personnes avec lesquelles on travaille qui font le succès ou l’échec. J’ai l’occasion de travailler avec des gens extraordinaires – ici au bureau d’ACORN, dans tout le pays avec mon équipe de programme, et sur le terrain avec les fermières et les épargnants de semences qui donnent vraiment forme à ce programme dans le Canada atlantique. Ce travail me donne également l’impression d’être une petite partie d’une solution importante. Je ne pense pas qu’il y ait quelque chose de plus motivant que cela.
Si vous étiez une graine, quelle graine seriez-vous ?
Hmm… Peut-être une graine de roquette ? J’ai très envie d’y aller, mais j’ai tendance à m’enfuir si je ne prends pas le temps de me reposer à l’ombre ? Je ne sais pas…