Nationale | Des lettres

Le CSA aborde le climat, mais se doit être transformateur d’une manière générale

Lettre ouverte de l'UNF

Introduction

Deux semaines passées, les ministres de l’Agriculture du fédéral, des provinces et des territoires se sont rencontrés à Saskatoon et ils ont conclu une entente en principe de s’engager envers un Cadre de politique agricole (CSA). L’objectif déclaré du CSA—rebaptisé Partenariat canadien durable pour l’agriculture—est de fournir une orientation stratégique afin de s’assurer que le Canada soit un chef de file en matière « d’agriculture écologiquement, économiquement et socialement durable.»

Le plus récent CSA n’atteint seulement qu’une partie de ces objectifs louables et urgents. L’Union nationale des fermiers (UNF) s’inquiète que l’ensemble du cadre ne soit pas suffisamment ambitieux pour aborder les risques économiques et climatiques croissants auxquels font face les fermiers canadiens. De plus, le nouveau CSA reste lié à un modèle de croissance insoutenable et il lui manque des mesures concrètes pour aborder les enjeux qui se chevauchent en matière d’inclusion et d’inéquité, de crise climatique et de résilience des fermiers.

Néanmoins, l’UNF est encouragée par des développements prometteurs au sein du CSA, y compris :

L’UNF est encouragée par cette augmentation du financement et par la promesse d’une amélioration de la collecte et du partage des données. Nous espérons que les connaissances scientifiques ainsi générées vont assurer l’efficacité des programmes de sorte qu’ils soient bénéfiques pour les fermiers, la souveraineté alimentaire et l’environnement. Nous sommes heureux que le financement par partage des coûts sera évalué en fonction du succès d’atteindre une réduction de 3–5 millions de tonnes (MT) des émissions de gaz à effet de serre (GES) et en réalisant une plus grande diversité en agriculture (voir ici-bas). Cependant, nous sommes préoccupés parce que le financement par partage des coûts est également évalué en fonction d’une augmentation insoutenable de 46 % des revenus agricoles et agroalimentaires (de 134.9 milliards $$ en 2021 à 250 milliards $$ d’ici 2028) et d’une augmentation de 13.5 % des revenus du secteur en exportations (82.2 milliards $$ en 2021 à 95 milliards $$ en 2028). L’UNF croit qu’il nous faut prioriser la culture équitable et durable des aliments et des produits agricoles. L’extraction de la richesse des sols canadiens n’est pas illimitée. Le temps est venu d’abandonner la fixation sur la croissance constante pour aborder les problèmes économiques, sociaux et environnementaux qui confrontent le secteur agricole.

C’est un début, mais bien loin d’être suffisant. L’UNF, membre fondatrice du regroupement Fermiers pour la transition climatique, a fourni des propositions concrètes pour réduire de presque trois fois ce montant-là d’émissions durant la même période de temps, basées sur des engagements appropriés et des appuis du gouvernement fédéral. Le niveau actuel d’engagement laisse le Canada en arrière en matière de réduction des GES agricoles.

L’UNF est encouragée par la perspective du nouveau Programme pour un paysage agricole résilient et son partenariat avec les jurisdictions ayant déjà des programmes existant en matière d’environnement et de résilience. Il nous fera plaisir de travailler avec le gouvernement pour s’assurer que les terres agricoles marginales et les terres humides soient entretenues et protégées tout en respectant le besoin des fermiers d’avoir un mode de vie durable. Cependant, nous sommes inquiets du manque de clarté sur les exigences d’admissibilité et du fait qu’au lieu d’avoir un programme fédéral adéquat pour réduire les émissions de GES en agriculture, le gouvernement s’appuie beaucoup trop sur le PPAR pour atteindre ses cibles de réduction des émissions de GES.

L’UNF a bien hâte de voir les détails entourant les changements proposés aux programmes GRE, y compris l’augmentation du taux de compensation de 70 % à 80 % et l’augmentation de l’enveloppe de financement global, quoique nous remarquons que cela ne ramène pas l’Agri-stabilité aux niveaux précédents qui appuyaient mieux les fermiers. Les programmes GRE doivent être inclusifs des fermes diversifiées à l’échelle humaine et qui ont fait leurs preuves en matière de pratiques agricoles écologiquement viables. L’UNF appuie les incitatifs reliant les pratiques écologiques à Agri-investissement, mais l’échéancier proposé est trop long et le plafond des revenus proposé devrait être plus bas en ce qui a trait à l’exigence d’un Plan environnemental de la ferme pour des fonds de contrepartie du gouvernement.

L’UNF est heureuse de voir que des efforts additionnels seront faits pour aborder et concentrer sur le rôle important des femmes, des peuples autochtones et des jeunes en agriculture, et elle a bien hâte de voir des programmes conçus de sorte à aborder cette priorité en publicisant des améliorations mesurables. Depuis longtemps, l’UNF priorise la représentation des femmes et des jeunes en agriculture et, ayant récemment enchâssé dans notre constitution la représentation des fermiers PANDC, nous prévoyons nous engager avec le gouvernement pour s’assurer que les groupes méritoires d’équité aient un siège à la table dans la conception de programmes affectant leurs communautés. Le CSA est plutôt vague sur comment il va appuyer les jeunes agriculteurs et les fermiers PANDC. L’UNF croit qu’il nous faut aller au-delà d’une simple « participation du secteur » et fournir un appui important de sorte que les PANDC et les jeunes deviennent entièrement propriétaires et exploitant de leurs fermes, qui reçoivent les outils et les ressources pour cultiver des aliments et des produits agricoles culturellement adaptés pour leurs communautés.

Nous sommes encore préoccupés par la crise de la main-d’œuvre agricole et, en tant qu’organisation qui a récemment créé une catégorie de membres pour les travailleurs agricoles tout comme nos membres fermiers traditionnels, nous reconnaissons les défis inhérents dans une conversation entre les fermiers qui ont besoin de maintenir un avenir financier stable pour leurs fermes et leurs travailleurs agricoles qui méritent un salaire équitable pour leur temps et leurs efforts. L’UNF persiste que les travailleurs agricoles migrants sont des gens qui méritent tous les droits et privilèges qui accompagnent Résidence permanente au Canada, y compris les droits à la mobilité. Nous sommes tout aussi préoccupés par le statut des travailleurs migrants dans les industries de production alimentaire, puisque notre durabilité en tant que secteur dépend en grande partie de leur bien-être.

Le gouvernement canadien s’est déjà engagé à une cible nationale de réduction de 30 % des émissions d’azote provenant du secteur agricole d’ici 2030. À la fois Agriculture et Agroalimentaire Canada (AAC) et Fermiers pour la transition climatique (FTC) ont détaillé comment une réduction de 30 % peut être réalisée sans réduction importante du rendement des récoltes. L’UNF appuie cet objectif graduel et à court-terme, mais elle est préoccupée que le message portant sur les réductions des émissions des engrais ne correspond pas au niveau de l’urgence climatique auquelle nous faisons face, étant donné que l’agriculture est la quatrième plus grande catégorie d’industrie émettrice de GES au pays. Le mercantilisme (profits excessifs) de l’industrie des engrais réduit le revenu net des fermiers. Le gouvernement devrait lancer une enquête sur les pratiques de l’industrie agricole qui non seulement arnaquent les fermiers sur le plan financier, mais qui encouragent également la surutilisation des engrais à base de combustible fossiles et qui cause une si grande portion de nos émissions de GES.

Un code de conduite pour les épiceries ne peut pas être autoréglementé par l’industrie à elle seule. Nous avons besoin que tous les niveaux de gouvernement travaillent ensemble pour faire enquête sur la collusion de prix et le mercantilisme par les épiceries oligopolistiques. Nous sommes en faveur de mesures pour prévenir la peste porcine africaine (PPA) et pour protéger la santé animale. Nous avons hâte d’apprendre les détails concernant toutes priorités réglementaires et toutes priorités en matière de commerce interprovincial et international, et nous allons recommander fortement qu’elles portent sur les réductions des émissions de GES, sur la protection des fermiers et d’éviter d’ancrer encore plus leur concentration dans le secteur agricole.

Conclusion

Les fermiers assument de plus en plus de risques dans un climat environnemental et économique qui continue à changer. Le Partenariat canadien durable pour l’agriculture a entrepris des démarches initiales pour aborder ces risques, mais n’a pas encore entamé les démarches vigoureuses nécessaires pour assurer la prospérité des fermiers canadiens et l’avenir de nos petits-enfants sur la ferme. L’UNF espère qu’une future planification au sein d’AAC et des négociations entre le gouvernement fédéral et les gouvernements individuels des provinces et des territoires vont nous faire passer des solutions graduelles à des solutions transformatives. Il est grand temps de tracer une voie nouvelle et courageuse. L’avenir de la production agricole, ainsi que la santé, la sécurité et le bien-être de tous les Canadiens en dépendent.